Intervention de Éric Kerrouche

Réunion du 20 décembre 2017 à 14h30
Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations — Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire

Photo de Éric KerroucheÉric Kerrouche :

Ce constat a été rappelé au cours de nos différents échanges : la compétence GEMAPI permet de répondre aux défaillances révélées par différents phénomènes climatiques qui ont causé des pertes humaines tout à fait tragiques et des dégâts matériels extrêmement importants.

Cette compétence renvoie donc à un besoin de sécurité et à un nécessaire traitement de la vulnérabilité des territoires et, bien entendu, elle appelle une gouvernance rationalisée.

Toutefois, nous l’avons rappelé précédemment, la mise en œuvre de cette compétence est techniquement complexe : elle le reste. Sa structuration institutionnelle est difficile et le partage des responsabilités est toujours flou. C’est donc légitimement que son application a suscité des inquiétudes chez les élus locaux. Il était important d’y répondre, alors que nous sommes à l’aube de 2018.

De cet impératif résulte la proposition de loi dont nous débattons aujourd’hui, dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire qui s’est tenue hier soir.

Je tiens à saluer tout le travail qui a été mené pour aboutir à ce compromis, notamment le travail accompli par le rapporteur du Sénat.

Cette proposition de loi clarifie et assouplit une partie du dispositif et rassure les élus locaux en raison de la pérennisation des engagements pris par les régions et les départements, de l’extension de l’assistance technique des départements ainsi que de l’assouplissement des modalités de transfert ou de délégation à des syndicats mixtes, avec la possibilité de la double sécabilité dont on a déjà parlé, au risque, cependant, d’émietter compétences et responsabilités.

Pour autant, à l’instar d’autres collègues, permettez-moi de souligner, au terme de ce travail parlementaire quelque peu frustrant, deux regrets.

Le premier a trait au temps dont a disposé le Sénat pour examiner cette proposition de loi et en débattre : il était plus que contraint, voire de l’ordre de l’urgence, et ce n’est pas sans conséquence, alors même que les enjeux en termes de sécurité pour les personnes et les biens sont centraux.

De nombreux travaux ont porté sur les contraintes temporelles qui pèsent sur les travaux parlementaires, et nous en avons de nouveau une illustration ici.

En effet, à force de pallier les difficultés d’un texte qui est nécessaire dans sa thématique, mais insuffisant dans ses modalités, on risque de créer d’autres difficultés tout simplement parce que l’on n’a pas tout le temps d’appréhender l’ensemble des problèmes et les éventuelles conséquences néfastes localement.

Ensuite, cela a été souligné, mais j’y insiste, il est évident que des problèmes essentiels ont été négligés. Je ne reviendrai pas sur l’absence de traitement des grands corridors fluviaux, ni sur la problématique spécifique des territoires littoraux, ni sur les problèmes de submersion marine et d’érosion du trait de côte, ni sur l’articulation avec les compétences « eau et assainissement » pour les eaux de ruissellement, ni sur la responsabilité des gestionnaires d’ouvrages bien entendu, quand bien même la proposition de loi traite partiellement cette question, ni encore – cerise sur le gâteau ! – sur la question du financement, dont l’État est cruellement absent, avec une taxe GEMAPI potentiellement fragilisée par la suppression progressive de la taxe d’habitation sur laquelle elle est pour partie assise. Vous le savez, les enjeux financiers sont colossaux.

Selon les estimations, je le rappelle, les travaux engagés par les collectivités représentent entre 1 et 1, 7 million d’euros du kilomètre, en fonction du territoire, ce qui est loin d’être neutre.

À ce sujet, le financement du cycle de l’eau doit être repensé autour des logiques de bassin et des solidarités amont-aval, ainsi que, peut-être aussi, tout simplement dans ses modalités.

Malgré ces insuffisances, cette proposition de loi répond pour partie, je l’ai dit, aux interrogations opérationnelles des élus locaux, tout en restant malheureusement, si vous me permettez l’expression, au milieu du gué.

Nous formulons par ailleurs le vœu que les différents rapports que le Gouvernement remettra au Parlement couvrent l’ensemble des problématiques évoquées précédemment et puissent – enfin ! – faire l’objet d’un véritable temps de réflexion et d’expertise de la part du Sénat.

Bref, au final, pour reprendre une image de saison – nous nous rapprochons de Noël –, mieux vaut se rassurer en se disant qu’il est préférable d’avoir une part de dinde que pas de dinde du tout !

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