Intervention de Éric Woerth

Réunion du 22 janvier 2008 à 22h15
Réduction et exonération de cotisations et de contributions de sécurité sociale — Adoption des conclusions du rapport d'une commission

Éric Woerth, ministre :

Certes, vous ne créez pas un monopole de la loi de financement et le législateur ordinaire ne deviendrait pas à proprement parler incompétent. Mais enfin, si les lois votées en juin n'ont plus d'effet le 31 décembre, on ne peut plus parler de compétence pleine et entière. Or, si la loi organique a réservé certains domaines à la loi de financement - les exonérations non compensées à la sécurité sociale, par exemple -, elle n'a pas interdit au législateur ordinaire de se prononcer sur l'assiette et le taux du prélèvement, conformément à l'habilitation de l'article 34 de la Constitution.

De surcroît, les délais que vous nous proposez ne permettront pas de mesurer l'effet de ces décisions, qui, pour beaucoup, n'auront pas eu le temps d'entrer en vigueur. De fait, les entreprises pourraient hésiter à utiliser des dispositifs dans l'incertitude de leur validation par la loi de financement et attendre que cette « épée de Damoclès » soit retirée. La proposition n'est donc pas si éloignée de celle de M. Carrez que j'évoquais tout à l'heure, qui vise à instaurer un monopole des lois de financement.

En outre, dans la plupart des cas, il n'y a pas d'intérêt financier qui justifierait une telle extension du périmètre des lois de financement puisque cette validation porte sur l'ensemble des exonérations, qu'elles soient ou non compensées par le budget de l'État. Il peut alors paraître paradoxal que ce soit le législateur financier social, dans le cadre du PLFSS, qui valide des exonérations, alors que l'impact financier est en réalité porté par le budget de l'État. Ce sujet a déjà été évoqué.

Ma seconde remarque porte sur la nécessité de traiter aussi l'intérêt des niches déjà existantes. Votre proposition semble rechercher un contrôle a priori des niches créées plutôt qu'un mécanisme d'évaluation a posteriori conditionnant la survie de la niche sociale. Il me semble, comme à vous-même, monsieur le rapporteur, qu'un des sujets essentiels est aussi l'évaluation des niches existantes, de leurs effets sur l'emploi et la croissance, de la pertinence du maintien du régime très favorable qu'elles emportent et qui a pu être justifié à une époque, mais ne l'est plus nécessairement après un certain temps.

Vous évoquez dans votre rapport l'idée d'une contribution minimale sur toute cette assiette ; c'est l'une des pistes possibles, sur laquelle nous devons travailler. Mais j'insiste, et cela ne vous étonnera pas au moment où le Gouvernement mène une révision générale des politiques publiques, sur ce besoin impérieux d'évaluation de l'impact et des effets de cette contribution minimale. Nous reviendrons sur ce sujet au cours du premier semestre de 2008.

Ce travail d'évaluation et de définition de bonnes règles de gestion, nous allons le mener à partir de vos travaux. Le groupe de Bercy sera d'ailleurs invité à se réunir dans les jours qui viennent.

Aiguillonné par vos commissions des finances et des affaires sociales, je souhaite effectuer, sur ce sujet des niches sociales et fiscales mais aussi, plus largement, sur celui du pilotage de nos finances publiques, des progrès décisifs en 2008. Notre agenda législatif devrait nous permettre de réaliser des réformes ambitieuses.

Vous le savez, une révision de la Constitution interviendra dans l'année. Peut-être nous fournira-t-elle un vecteur adapté pour avancer sur l'ensemble de nos comptes publics. J'aurais eu, pour ma part, une préférence pour une démarche de ce type.

Néanmoins, comme je partage pleinement vos intentions - en tout cas celles qui sont inscrites dans ce texte - et en dépit des quelques limites formelles d'ordre juridique que j'ai évoquées concernant la rédaction de cette proposition de loi, je ne peux pas faire un mauvais accueil à cette initiative parlementaire. Le Gouvernement est donc favorable à l'adoption de ce texte, dont il remercie les auteurs.

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