Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, M. le ministre de l’aménagement des territoires, de la ruralité et des collectivités territoriales soulignait dernièrement avec beaucoup d’insistance « l’importance de l’effort des collectivités qui ont contribué significativement au redressement des comptes publics ».
Au regard de la baisse continue de la dotation globale de fonctionnement, la DGF, et des annonces concernant les compensations d’exonérations d’impôt, tout semble indiquer que l’effort drastique demandé aux collectivités territoriales sera, en effet, prolongé cette année.
Certes, on nous vante une diminution de la baisse de la dotation globale de fonctionnement pour ce qui concerne le bloc communal, mais toujours est-il que la baisse de la DGF représente un manque à gagner de 10 milliards d’euros sur trois ans. Ce dernier budget de la législature entre donc dans la lignée de cinq années de réduction continue des moyens des collectivités territoriales et de leur capacité à répondre aux besoins des citoyens sur les territoires.
On le sait, cette cure d’austérité, totalement contre-productive, pénalise tout particulièrement les départements. Avec 1, 1 milliard d’euros en moins, ceux-ci doivent se préparer à une nouvelle diminution de 11 % de la DGF.
À nos yeux, ce coup de massue supplémentaire, au moment où la précarité explose, est injustifiable. Le Gouvernement ne peut ignorer la quasi-impossibilité pour quarante départements de financer, par exemple, le RSA. Comme si le cri d’alarme lancé par l’Association des départements de France en septembre dernier n’avait pas été entendu !
Il est d’autant plus incompréhensible d’affaiblir la collectivité en charge des politiques sociales que le dernier rapport du Secours catholique sur la pauvreté en France rappelle qu’il est plus que jamais nécessaire de renforcer les solidarités.
Alors même que le législateur a confirmé, au travers de différentes lois, la nécessité de maintenir et de conforter l’échelon départemental, on tue à petit feu, par l’étranglement financier, un maillon indispensable de la République et de sa cohésion sociale.
En ce qui concerne le bloc communal, si la baisse de la dotation diminue effectivement de 1 milliard d’euros par rapport à l’année dernière, le fait le plus marquant est le développement des différents dispositifs de péréquation horizontale. Au premier regard, et face à l’urgence, on ne peut que saluer l’augmentation de la dotation de solidarité urbaine, la DSU, de la dotation de solidarité rurale, la DSR, ou de la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR.
Toutefois, si l’ensemble de ces dispositifs constitue une véritable usine à gaz, un fatras de mesures technocratiques de moins en moins lisibles pour les élus locaux comme pour nos concitoyens, une tendance de long terme ressort très clairement : l’État tente aujourd’hui de modifier les règles de la péréquation, pour se défausser de ses responsabilités.
La péréquation verticale, fondement du fonctionnement républicain indispensable à l’égalité des territoires, est chaque année affaiblie. On amplifie la péréquation horizontale pour, si je puis dire, prendre aux uns et donner aux autres, au lieu de tirer l’ensemble des collectivités vers le haut.
Au-delà, je souhaite m’attarder sur la décision de l’État de transférer aux collectivités locales la totalité de la prise en charge des allégements fiscaux qu’il a pourtant lui-même mis en place. Cette nouvelle ponction va peser près de 500 millions d’euros.
Je rappelle que les associations nationales d’élus locaux s’opposent de manière unanime à cette mesure. Celle-ci pénalisera tout d’abord les communes les plus volontaires dans la construction de logements sociaux, celles dont les habitants ont les revenus les plus modestes et bénéficient donc de ces exonérations. Une nouvelle fois, les maires hors-la-loi, ceux qui ne font aucun effort, seront favorisés au détriment des maires bâtisseurs !
Toutefois, à quel prix tous ces efforts ? Au prix d’une baisse de l’investissement public local, qui a encore chuté de 10 % cette année, selon le dernier rapport de la Cour des comptes. Mesurez-vous bien les conséquences pour l’emploi local, pour un secteur comme le bâtiment et les travaux publics, le BTP ? Comment s’étonner de l’explosion du coût du revenu de solidarité active, ou RSA, quand les gens n’ont plus d’emploi ?
L’éternel argument gouvernemental de réduction des déficits publics n’est pourtant pas très crédible, quand, on le sait, l’endettement des collectivités ne représente toujours que 10 % de la dette publique.
Quel gâchis, quand on sait que le coût du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, ou CICE, s’élèvera à 1 % du PIB d’ici à 2020 – il va peser, en 2017, près de 20 milliards d'euros –, sans aucune création d’emploi ! Quel gâchis quand on sait que ces milliards d’euros pourraient justement être alloués à l’investissement public, qui, selon une dernière étude de l’Observatoire français des conjonctures économiques, l’OFCE, pourrait constituer la clef de la reprise économique et des créations d’emplois en France.
Je voudrais, enfin, évoquer la fiscalité locale.
Nous nous trouvons face à un projet de loi de finances pour 2017 qui est, aujourd’hui, dominé par les impôts payés par les ménages, avec plus de 30 milliards d’euros de taxes foncières et plus de 20 milliards d’euros de taxe d’habitation. Et le produit des taxes sur les consommations énergétiques qui est dévolu aux collectivités représente aujourd'hui le double de la contribution foncière des entreprises, elle-même quasiment rattrapée par l’augmentation de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères !
Enfin, mes chers collègues, s’agissant du financement des nouvelles compétences régionales en matière économique par une fraction de la TVA, visant, à terme, une suppression totale de la DGF des régions, permettez-moi de rappeler à quel point cet impôt est injuste. Quand les ménages dont les revenus sont inférieurs à 20 000 euros par an consacrent 10 % de leur budget à la TVA, ce taux descend à 6 % pour les ménages les plus riches.