Intervention de Roger Madec

Réunion du 27 février 2006 à 15h00
Égalité des chances — Article 3 bis priorité

Photo de Roger MadecRoger Madec :

Qui plus est, l'OCDE elle-même a reconnu que la flexibilité n'avait qu'un effet « ambigu » sur le chômage.

En définitive, le CPE n'apportera aux entreprises aucune incitation supplémentaire à l'embauche. En revanche, les dommages collatéraux pour les jeunes salariés seront considérables. Comment faire valoir ses droits lorsque l'on peut être licencié sans motif ? Comment faire respecter sa dignité alors qu'à la moindre contrariété l'employeur peut mettre fin au contrat de travail ? Selon une récente étude de la SOFRES, 40 % des salariés du privé déclarent ne pas se syndiquer « par peur des représailles » ; il est fort à craindre que ce chiffre n'atteigne 100 % parmi ces jeunes en situation précaire. Quant au droit de grève, il demeurera pendant deux ans une possibilité bien lointaine pour eux !

Au regard de son inefficacité et de l'importance de ses effets pervers, cette mesure doit de toute évidence être retirée. La gravité du chômage des jeunes ne peut justifier l'adoption de toutes sortes de mesures qui fragilisent le monde du travail, et nous devons nous méfier de l'alarmisme du Gouvernement, qui brandit l'épouvantail du chômage pour casser le code du travail.

Certes, le taux des actifs de moins de vingt-cinq ans en recherche d'emploi est en France, avec 23 %, l'un des plus élevés d'Europe. En revanche cette proportion tombe à 8, 1 % si l'on rapporte les jeunes chômeurs à l'ensemble de la population des quinze-vingt-cinq ans, soit un chiffre très comparable à celui de l'Angleterre.

Par ailleurs, le Premier ministre répète qu'il faut onze ans à un jeune pour s'insérer durablement sur le marché du travail. En réalité, trois ans après la sortie du système éducatif, 80 % des jeunes ont déjà un emploi, et les deux tiers travaillent en CDI. Dans ces conditions, on comprend mal pourquoi il faudrait infliger un CPE à toute la jeunesse alors que, pour sa plus grande partie, elle peut espérer travailler en CDI. Quant à la minorité de jeunes les plus en difficulté, elle restera de toute façon en dehors de ce dispositif.

Une autre voie existe, messieurs les ministres délégués, une méthode qui a permis entre 1997 et 2002 de réduire de 200 000 le nombre des jeunes au chômage. Mais, depuis le début de la législature, ce chiffre n'a cessé de recommencer d'augmenter, et l'on compte aujourd'hui 30 000 jeunes chômeurs supplémentaires, puisque vous vous êtes empressés de mettre à bas le système des emplois-jeunes, qui avait pourtant porté ses fruits.

Aujourd'hui, le Gouvernement cherche à tirer parti de ce bilan désastreux et à exploiter le désarroi grandissant des jeunes pour déréglementer le marché du travail. Mais ceux-ci ne sont pas prêts à n'importe quoi, croyez-le, car ils savent que d'autres solutions existent.

Ni le chômage ni la flexibilité des jeunes ne sont une fatalité ; la gauche l'a prouvé par le passé, et nous nous proposons de recommencer aujourd'hui en vous invitant à supprimer de l'article 3 bis, qui est vraiment indigne du marché du travail au xxie siècle.

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