Monsieur le ministre, j'ai été très attentive à vos explications. Permettez-moi de vous dire que le traitement discriminant porté par ce projet à l'encontre des jeunes me choque. En effet, proposer un contrat de travail précaire spécialement aux jeunes traduit une drôle de conception de la solidarité entre les générations.
Cette discrimination en fonction de l'âge va à l'encontre de ce que les jeunes sont en droit d'attendre en matière de cohésion sociale. Or ces jeunes ont le droit à la même considération que les autres salariés. Ils n'ont pas à être l'objet de votre mépris !
Ce projet de loi constitue un retour en arrière dramatique. Avec le contrat d'apprentissage, le Gouvernement tire un trait de facto sur le collège unique institué en France depuis 1975.
L'Assemblée nationale vient d'avaliser le travail de nuit pour les jeunes de quinze ans. Après le CNE, le CPE. Désormais, les employeurs ont les mains libres pour licencier sans motif.
Comme l'ont déjà dit nos collègues, ce dispositif contrevient à la convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail, qui date de 1982 et fut reconnue d'application directe par le Conseil d'État en 2005. C'est un retour à la toute-puissance de l'employeur.
Le rapport de force dans les entreprises, après vingt-cinq ans de chômage de masse, était déjà très défavorable aux salariés. Avec ce nouveau pas en avant, vous leur enlevez tout moyen de pression, tout moyen de défense. Vous leur laissez quelques droits, certes, mais sans aucun moyen de les défendre dans la pratique puisqu'ils sont entièrement soumis à l'arbitraire de leur patron.
Une autre norme internationale fondamentale est également bafouée en France aujourd'hui : la liberté de se syndiquer.
Un récent sondage de la SOFRES a révélé, en décembre dernier, que la première raison avancée par les personnes interrogées pour ne pas se syndiquer est, à 36 %, la peur des représailles. Avec le CPE, vous allez décupler cette crainte, à juste titre.
Ce que vous ne voyez pas, les patrons éclairés le voient très bien: Il faut du dialogue social, il faut des syndicats forts pour que les salariés puissent négocier. Or vous refusez cela !
Sans ces syndicats, les travailleurs plient, se courbent jusqu'à craquer. Le gouvernement auquel vous appartenez prépare aujourd'hui les explosions sociales de demain, minutieusement, loi après loi, d'ordonnances en 49-3.
C'est la raison pour laquelle votre contrat est tout à fait inacceptable.