Intervention de Anne-Marie Idrac

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 17 janvier 2018 à 9h30
Audition de Mme Anne-Marie Idrac haute responsable chargée de piloter la stratégie nationale sur le véhicule autonome

Anne-Marie Idrac, haute responsable chargée de piloter la stratégie nationale sur le véhicule autonome :

L'avènement du véhicule autonome représente un changement de paradigme, selon le terme très justement employé par M. Houllegatte, dont nous ne pouvons pas encore percevoir toutes les conséquences. Aussi, vous comprendrez que je n'ai pas la réponse à chacune de vos interrogations. Learning by doing disent les Anglais : les expérimentations en cours servent à nous éclairer progressivement. Ainsi, comme pour toute innovation marquée par une rupture des usages, l'expérience est passionnante, d'autant qu'elle concerne tant le champ de l'intelligence artificielle que celui des comportements humains et qu'elle engage une réflexion sur les interactions entre l'homme et la machine, entre la machine et son environnement physique et humain.

Messieurs Cornu et Houllegatte, vous avez évoqué l'hybridation des véhicules et des modes de conduite : bien évidemment, pendant plusieurs années, le temps nécessaire au renouvellement du parc automobile, plusieurs types de véhicules, plus ou moins autonomes, cohabiteront. L'hybridation des technologies au sein d'un même véhicule représente déjà une réalité puisque existent sur plusieurs modèles des délégations partielles de conduite.

Pour répondre à votre question, monsieur Fouché, l'unique moyen de sortir d'une autoroute est, à ma connaissance, de reprendre le contrôle manuel de votre véhicule autonome, sauf à ce que certains itinéraires aient été préalablement définis. D'ailleurs, et cela est frappant, aucun projet de véhicule autonome n'est à ce jour privé de volant.

J'insiste sur le rôle majeur des pouvoirs publics s'agissant du développement des véhicules autonomes, dans la mesure où ils ont en charge la définition des conditions d'usage : redevances, parkings, voies dédiées notamment. Le véhicule autonome permet d'envisager le solisme dans les transports sous un nouvel angle. Sans considérer naïvement que l'émergence d'une nouvelle technologie pourrait seule résoudre les difficultés politiques ou économiques d'un territoire, je crois indispensable d'intégrer, comme outil supplémentaire des politiques de mobilité, le véhicule autonome dans les dispositifs favorisant le covoiturage et le partage de véhicule, en matière de parking ou de péage par exemple. Exception faite du monde rural et avant même la pollution, la congestion des axes de communication constitue à mon sens le problème majeur des territoires.

Madame Bories, vous avez évoqué le risque de déresponsabilisation des usagers des véhicules autonomes. Un travail d'information et d'adaptation doit effectivement être mené auprès des conducteurs comme des autres usagers de la route et, peut-être, certaines réglementations - je pense aux passages piétons - revues. En tout état de cause, le conducteur d'un véhicule autonome reste responsable de sa conduite. Dès lors, il apparaît que le permis de conduire pourra connaître des évolutions, qui seront précisées en fonction des besoins mis en exergue par les expérimentations menées. Le véhicule autonome représente un changement technique, mais également culturel et, à terme, juridique. Je suis également convaincue, pour répondre à votre seconde question, que les personnes en situation de handicap bénéficieront, dans les années à venir, pour leur mobilité, des progrès réalisés en matière de délégation partielle puis totale de conduite.

Le marché du véhicule autonome, monsieur Fouché, se lancera fort probablement d'abord dans le haut de gamme, auprès de consommateurs à la recherche d'un confort de conduite et de technologies innovantes, avant de se diffuser à d'autres catégories de véhicules en fonction du développement, et donc de la démocratisation, des usages. S'agissant des véhicules collectifs, le marché sera à la mesure du dynamisme des trois opérateurs présents sur le territoire français et de la volonté des autorités organisatrices.

Enfin, bien que n'ayant jamais entendu, monsieur Bigot, évoquer la possibilité de dédier des voies ferrées désaffectées aux véhicules autonomes, il me semble que cette piste pourrait utilement être explorée dès lors que l'on cherche à développer ce type de mobilité sur l'ensemble du territoire.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion