Intervention de Raymonde Le Texier

Réunion du 27 février 2006 à 21h30
Égalité des chances — Article 3 bis suite

Photo de Raymonde Le TexierRaymonde Le Texier :

Une enquête récente montre que plus de 70 % des embauches effectuées en contrat nouvelles embauches l'auraient été sans ce dispositif, que 40 % de celles-ci l'auraient été en CDI, tandis que 28 % l'auraient été en CDD. L'effet de substitution est donc clair, tandis que la croissance qu'on nous annonce être plus forte que prévu ne se traduit pas par une augmentation significative de l'emploi salarié. Ajoutons que 48 % des employeurs ayant eu recours à un contrat nouvelles embauches déclarent évidemment ignorer à ce jour s'ils garderont la personne embauchée. Il nous paraît donc pour le moins difficile de conclure à la stabilité de la relation de travail créée par ce nouveau contrat.

À cette précarité de la relation de travail pourrait bien s'ajouter le péril de l'incertitude juridique pour les entreprises. En effet, s'il simplifie la rupture du contrat, au point d'offrir une période d'essai de deux ans, il n'en reste pas moins vrai que le contrat nouvelles embauches suscite bien des interrogations juridiques que ne manquera pas de soulever la jurisprudence.

Il en est ainsi des possibilités d'enchaînement de CDD et de CNE, des risques de recours devant les tribunaux internationaux ou nationaux pour abus de droit afin de connaître le motif de la rupture du contrat de travail au cours des deux ans de procédure simplifiée, et enfin des risques de requalification de CNE en CDI en cas de constat de rupture abusive.

Aujourd'hui, la question essentielle, dans le domaine de l'emploi des jeunes, est bien davantage centrée sur l'inadéquation entre la demande et l'offre d'emploi. Bien des entreprises sont actuellement dans l'impossibilité de recruter, parce qu'elles ne trouvent ni les qualifications ni les compétences dont elles ont besoin. C'est sur cette problématique qu'il faut nous concentrer, pour mieux cerner, au niveau des bassins d'emploi, les besoins des employeurs et les métiers en tension, pour inciter à la mobilité et pour revaloriser les filières professionnelles qui demeurent peu attractives.

Ni l'apprentissage à quatorze ans ni le CPE ne répondent à ces besoins. Ce sont, au contraire, des outils de dévalorisation des métiers et du travail.

Nous découvrons ce soir un nouveau concept, à savoir le CPE-CDI. C'est très intéressant ! Il est un peu étonnant, monsieur le ministre, que vous vous donniez tant de mal pour essayer de nous persuader que le CPE est un contrat bien plus intéressant que le CDD, autre contrat précaire, puisque le CPE peut déboucher sur un CDI, contrairement au CDD.

Il est tout de même étrange, je le répète, que vous vous donniez autant de mal, alors que, chacun le sait ici, l'intérêt majeur que vous trouvez, vous et le patronat, au CPE, c'est précisément de pouvoir licencier du jour au lendemain, et certainement pas au terme de deux ans !

Monsieur le ministre, je vous écoute attentivement lorsque vous développez votre théorie. Cela me rappelle un dicton populaire : « Qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ».

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