Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, le règlement Dublin III est une pierre angulaire de la politique européenne d’asile. Il repose sur le principe qu’un seul État européen est responsable de la demande d’asile d’une personne ressortissante d’un État tiers.
Il s’agit d’éviter à la fois que le demandeur d’asile ne sollicite successivement plusieurs pays européens, mais aussi qu’il ne soit renvoyé d’un pays à l’autre sans que sa demande soit jamais examinée. L’État responsable est celui qui a permis l’entrée ou le séjour du demandeur sur le territoire européen.
Adopté le 26 juin 2013, le règlement Dublin III s’applique aux vingt-huit pays de l’Union européenne ainsi qu’à l’Islande, à la Norvège, au Liechtenstein et à la Suisse, ces quatre pays faisant partie de l’espace Schengen.
Sa mise en œuvre par les États se fait en deux étapes. Tout d’abord, la détermination de l’État responsable de l’examen de la demande d’asile : en effet, l’État d’accueil, après étude du parcours migratoire du demandeur, peut estimer que la responsabilité de l’examen de cette demande relève d’un autre État européen. Il sollicite alors cet État, lui demandant de prendre en charge le demandeur. Ensuite, en cas d’accord de l’État sollicité, l’État requérant peut prendre une décision de transfert du demandeur vers cet État.
Depuis l’adoption de ce règlement, la France s’efforce d’assurer efficacement ces transferts. Or deux décisions de justice récentes, l’une de la Cour de justice de l’Union européenne, l’autre de la Cour de cassation, ont privé l’autorité administrative de la possibilité de recourir au placement en rétention.
Dans un arrêt du 7 mars 2017, la première cour a estimé que le paragraphe 2 de l’article 28 du règlement Dublin autorisant le placement en rétention n’était pas applicable à défaut d’adoption de mesures d’application par les États membres. En effet, cet article précise que le placement en rétention est possible « lorsqu’il existe un risque non négligeable de fuite » de l’intéressé, tandis que l’article 2 définit ce risque comme « l’existence de raisons, fondées sur des critères objectifs définis par la loi, de craindre la fuite » du demandeur.
En s’appuyant sur cet arrêt, la Cour de cassation a estimé que, « en l’absence de disposition contraignante de portée générale fixant les critères objectifs sur lesquels sont fondées les raisons de craindre la fuite du demandeur », le placement en rétention était illégal. Les préfectures se trouvent donc démunies pour assurer l’effectivité des transferts.
Mes chers collègues, cette proposition de loi tire les conséquences des arrêts précédemment cités. Elle permet de fixer un cadre clair assurant une mise en œuvre plus efficace de la procédure Dublin.
Elle a été enrichie par la commission des lois du Sénat d’ajouts pertinents permettant de lutter plus efficacement contre les refus de prise d’empreintes digitales, de faciliter l’organisation matérielle des visites domiciliaires, d’accélérer les procédures par la réduction de quinze à sept jours du délai de saisine du juge administratif contre une décision de transfert en l’absence d’assignation à résidence ou de placement en rétention, et de sécuriser les assignations à résidence des étrangers faisant l’objet d’une interdiction judiciaire du territoire.
Il s’agit donc d’un texte équilibré. Pour toutes ces raisons, le groupe Les Indépendants – République et Territoires soutient cette proposition de loi.