Intervention de David Assouline

Réunion du 25 janvier 2018 à 14h30
Application du régime d'asile européen — Article 1er

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Vendredi dernier, j’ai visité deux centres de rétention : celui de Vincennes, un centre important, et celui du Mesnil-Amelot. Permettez-moi de vous livrer mon témoignage pour que chacun se rende compte de quoi l’on parle – vous, monsieur le ministre d’État, le savez probablement. On parle ici d’enfants, mais la proposition de loi porte sur les « dublinés ».

Allant voir les retenus, je tombe tout d’abord sur une personne dont le médecin avait constaté depuis quinze jours qu’elle n’avait rien à faire là, compte tenu de son état psychique. J’ai pu constater que tous les autres retenus avaient peur d’elle et qu’elle était un danger pour tout le monde. Pourtant, depuis quinze jours, elle restait là. En effet, la décision appartient maintenant au médecin de l’OFII, qui ne voit pas les retenus, à la différence du médecin du centre.

Je tombe ensuite sur deux personnes en France depuis respectivement quinze et dix-sept ans, arrivées à l’âge de 2 ans et 5 ans. L’une a deux enfants, l’autre trois. Elles avaient mal renouvelé leurs papiers, mais travaillaient ou avaient travaillé. Ce n’est pas la population que vous imaginez : ce sont des personnes qui ont grandi et fait famille en France. Les voilà en centre de rétention.

Une autre avait été attrapée la veille de son opération pour une hernie, une semaine avant ma visite. Cela pouvait dégénérer, puisque, si elle devait être opérée, c’est que son état était grave…

Bref, une promiscuité incroyable, des gens qui se demandent ce qu’ils font là… Probablement certains avaient-ils commis des actes de délinquance – je ne suis pas tombé sur eux, mais, pas d’angélisme de ma part, je sais très bien que cela peut exister.

Mes chers collègues, c’est dans ces centres que l’on peut rester quarante-cinq jours et bientôt, avec la prochaine loi, jusqu’à quatre-vingt-dix jours !

À ce propos, monsieur le ministre d’État, je veux vous interpeller. Avant même l’adoption de cette proposition de loi, j’ai été informé que certains demandeurs d’asile « dublinés » placés dans ce centre de rétention à dix-huit heures se retrouvaient dans un avion à neuf heures le lendemain matin. Profitant de la nuit et du fait que personne ne pouvait s’en rendre compte, on contourne donc la loi.

J’ai interpellé à ce sujet le chef du centre de rétention, homme charmant et très dévoué à la République. Il m’a été confirmé que cette pratique avait cours, dans les deux centres, d’ailleurs. J’ai donc constaté une illégalité et je souhaite vous interroger sur ce point, monsieur le ministre d’État.

En relisant les débats sur cette loi, je comprends mieux les raisons pour lesquelles on veut allonger la durée de rétention à quatre-vingt-dix jours. En effet, si l’on place aussi les « dublinés » dans les centres, ces derniers vont être engorgés et les conditions sanitaires, les conditions de travail des personnels, le budget de ces centres…

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