Lorsque j'entends Guntram Wolff parler de coalition arbitraire ou de coopération inclusive, je reconnais bien un langage communautaire habituel. Je préfère pour ma part parler de coopération ouverte et de coalition exemplaire. Par ces expressions, la Commission veut continuer comme avant, alors que nous touchons au coeur de la souveraineté de nos États. La méthode communautaire traditionnelle ne fonctionnera pas si l'impulsion ne vient pas des capitales. Or nous sous-estimons le degré d'intégration considérable - les Britanniques sont en train de s'en rendre compte - de nos pays. Un pays ne peut pas adhérer à l'Union s'il pratique la peine de mort, ce qui n'est pas le cas pour les États-Unis.
Il faut des exemples. Il faut que la France et l'Allemagne donnent l'exemple - que cela plaise ou non aux autres. Ce qu'il faut, c'est que ces exemples s'inscrivent dans une démarche européenne, en vue d'avoir un jour une politique commune d'immigration, une gouvernance économique de la zone euro plus intégrée, une politique de défense plus commune. Mais le chemin est long.
Tout renvoyer sur la Commission, qui n'en peut mais et a déjà beaucoup fait - avec les orientations plus politiques du président Juncker - c'est se décharger de nos responsabilités nationales. C'est particulièrement vrai en matière de défense. M. Le Drian et Mme von Der Leyen veulent partager une base aérienne commune pour le transport stratégique. Que se passe-t-il aussitôt ? Tout le monde veut y participer, et nous nous retrouvons avec une coopération structurée permanente à 25 sur 28, ce qui ne veut rien dire. Chacun est content d'avoir 19 projets, mais en réalité, stratégiquement, nous n'avons pas avancé.
Il faut que nous soyons des Européens exemplaires et que nous montrions l'exemple par des réalisations concrètes. Cela s'appelle la méthode Schuman : « L'Europe ne se fera pas d'un coup, ni dans une construction d'ensemble : elle se fera par des réalisations concrètes créant d'abord une solidarité de fait », disait-il le 9 mai 1950. Nos amis de l'Est ne partagent pas notre politique migratoire. Mais s'ils voient que nous avons des règles communes, ils devront bien un jour s'y intéresser.