Intervention de Sandrine Rousseau

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 17 janvier 2018 : 1ère réunion
Audition de Mme Sandrine Rousseau présidente de l'association parler

Sandrine Rousseau :

Autre sujet : l'inversion de la charge de la preuve du consentement. Les femmes sont supposées consentantes et doivent faire la preuve qu'elles ne l'étaient pas. C'est une question très grave. Cet a priori du consentement me pose problème. En outre, le rassemblement des différentes plaintes concernant un agresseur n'est pas systématique alors qu'il suffirait d'une circulaire du garde des Sceaux aux juges d'instruction pour progresser dans la connaissance de l'étendue des violences.

L'émission On n'est pas couchés a révélé le traitement qui est réservé à celles qui dénoncent des violences sexuelles : la polémique qui en a résulté portait sur l'attitude de Christine Angot mais selon moi, celle des deux autres animateurs était tout aussi problématique. Je vous remercie pour votre soutien.

Par ailleurs, impliquer l'entourage de façon à ce qu'il se sente concerné et l'amener à agir est un vrai sujet.

Vous l'avez dit, le recueil de la parole des femmes victimes de violences dans les territoires ruraux et ultramarins est délicat : les interlocuteurs auxquels elles pourraient s'adresser sont en nombre limité. De plus, en milieu rural, peut se poser un problème de confidentialité. Quand tout le monde se connaît... Une solution serait de permettre à ces victimes de s'adresser à des structures éloignées de leur domicile ; la plainte en ligne est aussi une possibilité.

Si le monde politique est un monde de séduction, c'est aussi un monde de pouvoir, y compris d'abus de pouvoir... Les violences sexuelles relèvent non pas de la séduction mais bel et bien du pouvoir : ce que j'ai ressenti n'a rien à voir avec la séduction ! Mon agression s'est déroulée dans le cadre d'une réunion que j'animais. La situation était totalement étrangère à la séduction.

Je n'ai cessé de parler de mon agression depuis les minutes qui l'ont suivie, mais personne n'a jamais réellement entendu ; selon moi, cette surdité est à mettre au compte de l'extrême influence de mon agresseur au sein du parti, nul n'ayant voulu l'affronter sur les dénonciations dont il était l'objet. Or nous étions une quinzaine à le dénoncer. Donc si le parti avait sérieusement enquêté après mes prises de parole, il serait apparu qu'il y avait bien un problème qui ne relevait pas de la seule séduction.

De cette quinzaine de femmes qui ont été agressées ou harcelées, peu demeurent au sein du parti ! Si notre parole n'a pas été contestée car nous étions trop nombreuses, s'est cependant tissé un climat parfois délétère autour de nous et à certains moments, nous avons été marginalisées au sein du parti, considérées comme des femmes dont il fallait se méfier.

Au regard de mon expérience, je suis convaincue que l'un des combats des femmes agressées sera de reprendre le chemin de la politique pour faire évoluer la société et ne pas les laisser cantonner au rang de victimes, mais montrer qu'elles sont des femmes qui peuvent assumer des responsabilités.

L'Association européenne de lutte contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT) nous a éclairées, pas lors du dépôt de plainte, mais pendant l'enquête journalistique et sur le parcours judiciaire que l'on allait devoir affronter ; les membres de l'association sont des femmes aux rares compétences juridiques, malheureusement confrontées à un afflux de demandes difficile à gérer.

Mais quels vont pouvoir être les recours des femmes qui subissent des violences sexuelles au sein de leur entreprise, avec la suppression du CHSCT et la révision des prérogatives de la Médecine et de l'Inspection du travail ?

Je propose que soient créés des référents dédiés, hors hiérarchie, désignés pour recevoir les témoignages et alerter la hiérarchie.

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