Intervention de Sophie Primas

Commission des affaires économiques — Réunion du 30 janvier 2018 à 16:5
Projet de loi relatif à l'organisation des jeux olympiques et paralympiques 2024 — Examen du rapport pour avis

Photo de Sophie PrimasSophie Primas, présidente et rapporteur pour avis :

Nous examinons à présent le projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques 2024 ; deux articles nous ont été délégués au fond, et nous nous sommes saisis de quatre autres pour avis. J'ai repris ce rapport à la volée, notre collègue François Calvet, que nous avions désigné comme rapporteur, étant retenu chez lui par des ennuis de santé. Nous souhaitons le retrouver prochainement, ainsi que notre collègue Alain Bertrand, en meilleure forme.

La France accueillera en 2024 les jeux Olympiques et Paralympiques, un événement majeur pour l'image de notre pays, mais aussi pour notre économie et nos territoires.

C'est un enjeu pour nos territoires, car si les jeux ont été attribués à Paris, de nombreux autres territoires sont également concernés, comme le département de la Seine-Saint-Denis, les villes de Marseille, Lyon, Bordeaux, Lille, Nice, Toulouse, Nantes, Saint-Étienne...

C'est un enjeu aussi pour notre économie, l'impact économique et touristique des jeux étant loin d'être négligeable : plus de 11 millions de spectateurs sont attendus, et ces jeux doivent être un « accélérateur d'investissement » selon le Gouvernement, qui estime leurs retombées économiques à au moins 10 milliards d'euros. Nous sommes preneurs... J'ajoute que 250 000 emplois en lien avec les jeux pourraient être créés.

François Calvet a proposé que notre commission entende, sur l'aspect économique des jeux, le délégué interministériel Jean Castex. L'agenda de ce dernier ne permettait pas l'organisation de cette audition avant l'examen du projet de loi par notre commission, mais il est convenu que nous l'entendrons ultérieurement.

Ce projet de loi doit permettre aux organisateurs, conformément aux engagements pris auprès du Comité international olympique et du Comité international paralympique, de disposer de l'ensemble des outils nécessaires à une préparation et une organisation les meilleures possible. De tels projets de loi ont déjà existé, pour les jeux Olympiques de Grenoble de 1968, et pour les jeux Olympiques d'Albertville de 1992.

Le projet de loi comprend des mesures en matière de sport, de sécurité, de transport, d'urbanisme et de logement. La commission des lois, saisie au fond, nous a délégué l'examen des articles 12 et 13, relatifs au logement. Par ailleurs, notre commission s'est saisie pour avis des articles 7, 8, 10 et 10 bis, relatifs à l'urbanisme.

La philosophie du titre II, qui prévoit d'adapter certaines règles en matière d'urbanisme, d'aménagement et de logement, n'est pas de légiférer sur ces questions de manière générale - ce sera l'objet du projet de loi « ELAN » -, mais de prévoir des dérogations ciblées au droit commun, indispensables pour faciliter la livraison des infrastructures nécessaires dans les délais impartis.

Plus précisément, les services du Gouvernement ont passé en revue la législation en vigueur pour recenser les obstacles normatifs à la réalisation des projets de construction et d'aménagement prévus par le dossier de candidature français. Il s'agit donc d'un projet de loi de simplification du droit ad hoc, dont l'objet se limite à la préparation des jeux de 2024.

Les dispositions touchant à l'urbanisme sont traitées au fond par la commission des lois, mais nous avons souhaité, compte tenu de nos prérogatives dans ce domaine, nous en saisir pour avis, fût-ce pour constater qu'elles ne soulèvent pas de difficulté. C'est bien ce constat qui peut être dressé : les dispositions urbanistiques du projet de loi sont de nature à accélérer et sécuriser les projets d'aménagement prévus, et rien, ni dans le fond ni dans la forme, ne justifie des amendements de notre part.

L'article 7 dispense de formalités au titre du code de l'urbanisme les constructions et aménagements temporaires nécessaires aux jeux. Par exemple, en Seine-Saint-Denis, il faudra construire le pavillon de badminton au Bourget pour 7 000 places, le pavillon de volley à Dugny pour 17 000 places et le site de tir à La Courneuve. Bien que temporaires, ces constructions sont souvent d'une ampleur et d'une durée d'installation bien supérieures à ce qui s'observe dans les cas de dispense de formalités. L'article 7 sécurise ces opérations exceptionnelles. Le dispositif est bien encadré, puisqu'un décret en Conseil d'État fixera la durée maximale d'implantation - dix-huit mois au plus - et la durée maximale de remise en état initial des sites - douze mois au plus.

L'article 8 prévoit qu'une opération d'aménagement ou une construction nécessaire à l'organisation et au déroulement des jeux pourra être réalisée selon la procédure intégrée pour le logement, la PIL. Créée à l'origine pour accélérer les grands projets de construction de logements sociaux, cette procédure réduit fortement les délais lorsque la réalisation d'un projet se heurte aux normes de planification en vigueur. Elle permet de rendre le plan local d'urbanisme et les documents supérieurs à celui-ci compatibles avec le projet envisagé, en une seule et même procédure accélérée.

Cet outil très puissant paraît bien adapté à l'objectif d'achever les opérations d'aménagement nécessaires aux jeux dans les délais impartis. Au reste, je pense que le champ d'application de la PIL est appelé à s'étendre - peut-être, madame Estrosi-Sassone, dans le cadre du projet de loi « ELAN ». Pour la conduite accélérée de projets ayant des impacts sur la hiérarchie des normes limités aux documents d'urbanisme, il est possible de recourir à la procédure de déclaration de projet, un outil efficace désormais bien maîtrisé par l'État et les collectivités territoriales.

L'article 10 bis prévoit que le permis de construire pourra autoriser les constructions nécessaires aux jeux, mais aussi le changement de destination de ces constructions après les jeux, lorsque la destination ultérieure est connue. Cet outil sécurise la reconversion des bâtiments après les jeux et leur affectation à un autre usage, comme le logement.

Enfin, l'article 10 reprend une disposition de la proposition de loi de simplification du droit de l'urbanisme déposée en 2016 par François Calvet et Marc Daunis. Cette disposition donne aux collectivités territoriales la faculté de fusionner la délibération de création et la délibération de réalisation d'une zone d'aménagement concerté, ce qui peut être utile pour des projets d'aménagement de faible dimension dont les éléments sont connus suffisamment tôt.

De nombreuses dispositions de cette proposition de loi sénatoriale ont déjà été reprises par le Gouvernement ou le seront prochainement, notamment en matière de contentieux de l'urbanisme.

Je propose à la commission d'émettre un avis favorable à l'adoption de ces quatre articles relatifs à l'urbanisme, sans leur apporter de modification.

J'en viens aux dispositions relatives au logement. L'examen des articles 12 et 13 nous est confié au fond. Un village des médias et un village olympique et paralympique seront construits en Seine-Saint-Denis. Un village olympique sera également construit dans les Bouches-du-Rhône, où se tiendront les épreuves de voile. Ces villages comporteront des structures d'hébergement des personnes participant aux jeux. Les locaux seront conçus pour s'intégrer dans les villes où ils seront situés. En Seine-Saint-Denis, ils ont ainsi vocation à devenir des logements sociaux, des logements libres, un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, des logements étudiants, des commerces et des bureaux.

Je rappelle que, pour bénéficier d'aides de l'État, les bailleurs sociaux doivent conclure une convention APL qui les oblige à respecter certaines conditions de décence, de loyers et de plafonds de ressources. Or les conditions d'utilisation des locaux pendant les jeux sont incompatibles avec ces dispositions, auxquelles il convient donc de déroger à titre temporaire.

Aussi l'article 12 donne-t-il la possibilité aux organismes HLM de construire et d'acquérir des locaux situés en Seine-Saint-Denis et dans les Bouches-du-Rhône et de les mettre temporairement à la disposition du comité d'organisation pour la durée des jeux, ces locaux devant ensuite être transformés en logements à usage locatif. Il prévoit en outre de suspendre les effets de la convention APL durant la mise à disposition.

La cessation d'effet de la convention APL portant sur des logements appartenant à un organisme HLM entraîne l'application des règles prévues au livre IV du code de la construction et de l'habitation, qui concernent notamment les conditions d'attribution et de détermination du loyer. L'Union sociale pour l'habitat considère que la suspension de la convention APL pourrait être assimilée à ce cas de cessation d'effet de la convention APL. Afin de lever toute difficulté d'interprétation, je vous propose qu'il soit également dérogé à titre temporaire, pour ces locaux, aux règles des chapitres I et II du titre IV du livre IV du code. Tel est l'objet de l'amendement AFFECO.1.

Par ailleurs, des logements vacants réservés aux étudiants ou situés dans des résidences universitaires pourront également être utilisés pour assurer le logement des personnes participant aux jeux Olympiques et Paralympiques. Près de 5 000 logements, répartis sur environ trente-quatre résidences universitaires, pourraient être mobilisés, selon l'étude d'impact.

Or l'utilisation des résidences étudiantes obéit à certaines conditions qui ne pourront pas être respectées dans le cadre de la mise à disposition de logements pour les jeux. C'est pourquoi l'article 13 prévoit que des logements destinés à des étudiants, vacants au 1er juillet 2024 et situés en Île-de-France, dans les Alpes-Maritimes, les Bouches-du-Rhône, la Gironde, la Haute-Garonne, la Loire, la Loire-Atlantique, le Nord et le Rhône, pourront être loués jusqu'au lendemain de la clôture des jeux Paralympiques pour accueillir les personnes accréditées, la date ayant été choisie pour perturber le moins possible la rentrée universitaire. Il prévoit également que les effets des conventions APL attachées à ces logements seront suspendus le temps de la mise à disposition.

Pour ces logements aussi, je vous propose de prévoir une dérogation, le temps de leur mise à disposition, aux règles des chapitres I et II du titre IV du livre IV du code de la construction et de l'habitation. Tel est l'objet de l'amendement AFFECO.2. Sous réserve de l'adoption de ces deux amendements, je vous invite à émettre un avis favorable sur le projet de loi.

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