Intervention de Laurent Vallée

Commission des affaires économiques — Réunion du 31 janvier 2018 : 1ère réunion
Audition de M. Laurent Vallée secrétaire général du groupe carrefour

Laurent Vallée, secrétaire général du groupe Carrefour :

J'allais le dire ! De fait, les relations entre industrie et commerce sont caractérisées par dix mois d'apaisement, comme il est normal entre partenaires commerciaux, et deux mois de tensions, entre décembre et février. J'entends que l'adoption de la charte aurait dû apaiser les relations. Je crois au contraire que tout projet d'intervention du législateur accroît les tensions : les opérateurs défendent leurs intérêts en communiquant, et il y a dans tout cela une part de jeu de rôle et de postures. Il faut ajouter à ce contexte les voeux du Président de la République au monde agricole, ainsi que les états généraux de l'alimentation. Et mentionner enfin que, pour Carrefour comme pour les autres, l'environnement compétitif et concurrentiel est difficile.

J'ajoute que les négociations actuelles concernent essentiellement les produits transformés : ce sont des négociations entre la grande distribution et les industriels. Pour les produits bruts et les marques propres, les négociations ont lieu dans un autre cadre, tout au long de l'année. Nous avons des relations directes avec les agriculteurs à travers la filière Carrefour, dans un contexte très différent et plus apaisé, puisque l'enjeu est de garantir un approvisionnement en produits bruts de qualité sur le long terme. Avec des groupes transformateurs, le rapport de force et la nature des discussions sont différents.

Indépendamment de la manière dont se déroulent les négociations commerciales, il y a une conscience forte dans l'ensemble de la filière de la nécessité d'améliorer les revenus des agriculteurs. Le projet de loi présenté aujourd'hui doit être mis en oeuvre avant l'automne. Ses trois mesures phares sont l'inversion de la construction du prix, c'est-à-dire la prise en compte du prix de revient des agriculteurs dans la construction du prix ; la modification du seuil de revente à perte, avec l'affectation d'un coefficient qui devrait être de 1,10 ; et l'encadrement des promotions. Le groupe Carrefour a soutenu la philosophie générale des états généraux de l'alimentation et les conclusions de l'atelier n° 7, présidé par le Premier président Canivet. Il reste un mois pour tirer les conclusions et rédiger un projet de texte qui exprime une position relativement harmonieuse de l'ensemble du secteur.

Cet après-midi se tient au Sénat une table ronde réunissant toutes les enseignes sur la question des centres-villes. Le commerce de proximité est un élément essentiel du plan de transformation de Carrefour, et donc de notre développement. La combinaison du physique et du digital est indispensable pour procurer un service de grande qualité au client. Le maillage territorial reste donc essentiel, à condition d'être revisité. En France, en moyenne, un client peut trouver un magasin Carrefour à moins de huit minutes de chez lui, grâce à notre réseau de 4 200 magasins de proximité, auxquels il faut ajouter les hypermarchés. Nous avons annoncé la création sur les cinq prochaines années de 2 000 magasins de proximité et de 200 dès 2018. Nous y développerons la livraison à domicile et le click and collect.

Certes, les centres-villes connaissent des difficultés économiques. Il semble toutefois que l'opposition entre grandes surfaces de périphérie et commerce de proximité, qui a cristallisé trente ou quarante ans de débats sur la manière dont on devait protéger les centres-villes, ne soit pas le facteur déterminant dans la désertification. Les difficultés économiques et sociales locales, très diverses selon les territoires, sont davantage à prendre en compte, ainsi que le développement de l'e-commerce, l'évolution des habitudes de consommation et de la démographie, la taille des emplacements, leur accessibilité ou la présence de parkings.

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