Intervention de Jean-Marie Mizzon

Réunion du 1er février 2018 à 15h00
Fonds d'indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Jean-Marie MizzonJean-Marie Mizzon :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le vice-président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui nous concerne tous. Elle est des plus délicates à aborder, tant le sujet est douloureux pour bon nombre de nos concitoyens.

Les produits phytopharmaceutiques sont utilisés pour favoriser la réalisation d’une agriculture intensive, qui ne permet plus aux agriculteurs de vivre dignement. Ces pratiques ont des conséquences sur la santé de ceux qui les manipulent et, au-delà, sur celle des riverains et sur l’environnement.

Je ne parle pas des conséquences, en bout de chaîne, sur les consommateurs, dont nous ne serons probablement saisis de l’ampleur que dans les années à venir.

Dès lors, que faire ?

La mission commune d’information sur les pesticides et leur impact sur la santé, présidée par Mme Sophie Primas et rapportée par Mme Nicole Bonnefoy, a fait de très nombreuses propositions. Les auteurs du texte les ont traduites par la création d’un fonds d’indemnisation dédié, financé par une fraction de la taxe sur les produits phytopharmaceutiques.

Je remercie les auteurs de s’être saisis de cette question face à la carence des gouvernements successifs qui, bien que conscients des enjeux, n’en ont jamais pris la pleine mesure.

Je remercie également le rapporteur pour son travail.

La formule retenue, même si elle va dans le bon sens, n’est pas celle qui permettra de résoudre cette question éminemment douloureuse – j’insiste sur ce point.

La mission d’information avait conclu, notamment, à la nécessité de réformer le système de réparation des victimes de maladies professionnelles en facilitant les démarches de reconnaissance des maladies et en prenant en compte plus efficacement les avancées scientifiques. Il était également question de gestion et d’uniformité des procédures. J’y reviendrai.

Aujourd’hui, et nous en sommes tous d’accord, le système d’indemnisation n’est pas à la hauteur et trop de gens sont dans le désarroi. Les constats effectués par la mission en 2012 sont malheureusement toujours d’actualité : les tableaux de maladies sont trop peu nombreux, les critères d’accès à l’indemnisation, trop rigides, les informations concernant les pathologies et leur lien avec l’exposition aux pesticides, insuffisantes.

Le financement repose uniquement sur la solidarité nationale, sans pour autant garantir une équité de traitement entre les personnes concernées. Il faut donc le faire évoluer.

Je ne pense pas qu’il soit pour autant opportun de créer un fonds ad hoc. Je ne pense pas non plus que le financement prévu aujourd’hui soit suffisant : c’est d’ailleurs l’avis même du rapporteur, qui indique que cette taxe sera amenée à évoluer. Je crois enfin que la caisse centrale de la MSA ne souhaite pas assumer la gestion d’un tel fonds.

Ces constats conduiront la majorité de notre groupe à s’abstenir sur ce texte. Cependant, nous ne nous opposerons pas à cette proposition de loi, car elle a le mérite d’obliger le Gouvernement à agir, et à agir vite.

Créer un fonds dédié irait à l’encontre de la ligne de conduite que nous souhaitons voir respectée sur la simplification et la rationalisation de notre système de protection sociale. Les mécanismes existent, il faut les faire évoluer, pas en ajouter de nouveaux.

L’indemnisation des victimes de pesticides est possible en cas de reconnaissance d’une maladie professionnelle et se fonde sur des tableaux qui recensent ces pathologies. Ces tableaux doivent pouvoir être complétés plus rapidement sur la base d’informations fiables et permettre une indemnisation plus étendue. Nous pensons d’abord aux agriculteurs. Mais les jardiniers, cantonniers, employés d’entreprises de produits phytopharmaceutiques sont également concernés et ne doivent pas être oubliés. Les critères d’indemnisation doivent, en effet, prendre en compte cette diversité d’usages et d’usagers.

Il faut également prévoir un financement pérenne et une gouvernance efficace. Le financement repose aujourd’hui uniquement sur la solidarité nationale. La proposition de loi prévoit un financement par la taxe sur les produits phytopharmaceutiques. N’est-il pas plus juste de prévoir un financement mixte ? L’industrie doit participer, mais cela ne saurait être suffisant pour garantir une indemnisation complète.

Les pistes sont nombreuses et les bonnes volontés ne manquent pas, sur toutes les travées de notre assemblée, pour venir en aide aux victimes, dont les témoignages poignants nous ont tous bouleversés au plus haut point. Malheureusement, force est de constater que cette proposition de loi n’y répond que partiellement, les enjeux étant beaucoup plus importants.

C’est au Gouvernement d’agir avec tous les moyens dont il dispose et avec le soutien du Parlement, qui travaille sur ce sujet depuis de nombreuses années. Il me semble dès lors plus efficace d’aborder cette question dans le cadre du prochain PLFSS, dans quelques mois.

Madame la ministre, vous avez beaucoup promis lors de la discussion du PLFSS pour 2018

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