Désolé, mais je suis un peu tombée dans le piège de l'émotion. L'émotion ne peut être un cap. Aux juristes de cette commission, je veux rappeler que nous sommes des politiques. La société attend de nous que nous nous chargions de ces problèmes. Nous n'avons pas voulu rajouter de l'horreur à l'horreur, et c'est pour cette raison que nous ne vous avons pas tout dit.
Il est vrai que la pédophilie a toujours existé, mais comment faire pour que les victimes soient prises en charge ? Au temps de Socrate, il n'y avait ni réseaux sociaux ni darknet. Nous n'avons pas anticipé cette évolution sociétale terrible. La question n'est pas pourquoi, mais comment faire, aujourd'hui.
Il est vrai, madame Benbassa, que le mot résilience est à la mode, mais n'oublions pas non plus que certaines des victimes d'agressions sexuelles en font la cause de leur mal-être. Or, tel n'est peut-être pas le cas. Le prêt à penser doit être banni.
Le virus est planétaire ; nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas.
Si nous avons proposé la présomption de contrainte, c'est pour son efficacité. À l'origine, nos concitoyens ont été horrifiés par une correctionnalisation d'un fait de viol, mais c'était faute de moyens.
Le sujet qui nous préoccupe touche à la nature de l'homme qui peut se conduire pire qu'une bête : nous sommes là pour en prendre connaissance et le faire savoir.
Je ne suis pas favorable à l'imprescriptibilité pour ces faits, car nous risquerions de la banaliser. En revanche, la victime sera marquée à vie.
Notre but est de remettre le monde à l'endroit et de dire que certaines choses ne se font pas. La victime n'attend pas forcément une réponse pénale. Croyons en l'humain : il y a forcément du blanc dans toute noirceur.