Intervention de Frédérique Gerbaud

Réunion du 7 février 2018 à 14h30
Orientation et réussite des étudiants — Suite de la discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Frédérique GerbaudFrédérique Gerbaud :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la commission des affaires sociales s’est saisie pour avis de l’article 3 du projet de loi supprimant le régime de sécurité sociale étudiant. Elle a étendu son examen, sur le même volet de la santé, à l’article 3 bis.

Ce n’est pas la première fois que le Sénat est appelé à débattre de ces sujets : une proposition de loi mettant fin au régime social étudiant a été votée en novembre 2014 dans notre hémicycle, sur l’initiative de notre collègue Catherine Procaccia.

La réforme engagée par le projet de loi s’inscrit dans le droit fil des préconisations de notre assemblée. Elle fait également écho à des réflexions engagées par la commission des affaires sociales, dès 2012, au sein d’un groupe de travail.

Les constats posés alors, étayés depuis par de nombreux rapports, demeurent en grande partie d’actualité.

Lors de sa création en 1948, le régime étudiant avait vocation à favoriser l’autonomie des jeunes et à prendre en compte leurs besoins spécifiques en matière de santé. Or il ne semble plus répondre efficacement à cet objectif : les allers et retours vers et depuis le régime étudiant, par nature transitoire, peuvent être sources de dysfonctionnements et, in fine, entraver l’accès des jeunes à la santé.

Notre but n’est pas de remettre ici en question la capacité des organismes gestionnaires, qui ne sont pas seuls responsables d’un système porteur en lui-même de complexité et de lourdeur administrative. La qualité du service offert, souvent critiquée, s’est d’ailleurs améliorée avec l’adossement en 2015 d’un des opérateurs, La Mutuelle des étudiants, au régime général.

Dans le prolongement de cette évolution, le projet de loi a pour objet d’engager une réforme structurelle qui devrait entraîner une simplification des démarches pour les jeunes et leurs familles, puisque les étudiants demeureront rattachés au régime de leurs parents.

La commission des affaires sociales a approuvé cette réforme, tout en étant vigilante quant aux conditions de sa réussite.

Je mettrai l’accent sur trois enjeux.

Le premier enjeu est organisationnel. La suppression du régime étudiant va impliquer un profond bouleversement, en particulier pour le réseau des mutuelles étudiantes régionales. Après la réforme du régime social des indépendants, l’intégration d’une grande partie de leurs personnels au sein du régime général, d’ici au mois de septembre 2019, sera un nouveau défi pour l’assurance maladie. Nous serons attentifs à ce que ce transfert se déroule dans les meilleures conditions.

Par ailleurs, la suppression de la cotisation pour les étudiants dès la rentrée prochaine est certes positive pour les familles, mais son impact sur l’équilibre des comptes sociaux devra être précisé dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nous y veillerons.

Le deuxième enjeu est l’exigence de qualité du service rendu aux étudiants, à laquelle ils sont à juste titre attentifs, et la prise en compte par l’assurance maladie des besoins propres à ce public, comme la confidentialité des échanges, la dématérialisation des démarches, l’accueil des étudiants étrangers ou encore l’adaptation des supports de communication. Finalement, ce qui est en jeu, c’est l’appropriation de notre système de protection sociale par les jeunes au moment où ils en découvrent le fonctionnement.

Nous le savons, beaucoup de pédagogie reste à faire. C’est pourquoi il est important que les représentants des étudiants demeurent associés au nouveau dispositif. L’Assemblée nationale a fait un premier pas en ce sens en introduisant un représentant au sein du conseil de la Caisse nationale d’assurance maladie ; la commission des affaires sociales a proposé de porter ce nombre à deux, ce qui permettra une représentation pluraliste des associations étudiantes, et donc l’expression de leur diversité.

Le troisième enjeu est celui de la prévention en matière de santé. Là aussi, les attentes sont fortes, même si des actions ont déjà été mises en place par les mutuelles étudiantes ou d’autres acteurs. Tous les sujets, qu’il s’agisse des thématiques liées aux addictions, à la contraception, au stress, ne sont pas spécifiques aux étudiants, et n’ont pas vocation à l’être, mais la plupart de mes interlocuteurs ont mis en avant la nécessité de parler aux étudiants et d’agir auprès d’eux selon des modalités adaptées, en privilégiant des actions de terrain et en associant leurs pairs.

La commission des affaires sociales a précisé le pilotage des actions de prévention en matière de santé en direction des étudiants, soulignant l’articulation entre les priorités de santé publique et la prise en compte des spécificités de la vie étudiante. Cette bonne coordination devra reposer sur une action volontariste des ministères de la santé et de l’enseignement supérieur, ainsi que sur des moyens dédiés pour que ces actions se diffusent largement dans les territoires.

Dans ce cadre, les actions favorisant l’accès aux soins, par exemple par le développement des centres de santé universitaires, me paraissent répondre à un réel besoin. Si la commission des affaires sociales a proposé de supprimer l’article 3 bis, qui a pour objet de demander un rapport sur ce sujet, elle n’en reste pas moins sensible à cet enjeu, qui renvoie toutefois à des questions dont le champ dépasse l’objet du présent projet de loi.

Vous l’aurez compris, la commission des affaires sociales est favorable à la réforme technique engagée avec la suppression du régime étudiant, tout en souhaitant que celle-ci contribue à servir un objectif plus large : la santé des jeunes.

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