Intervention de Frédérique Vidal

Réunion du 7 février 2018 à 14h30
Orientation et réussite des étudiants — Discussion générale

Frédérique Vidal :

Il est donc très important de retravailler la question, y compris au niveau des programmes. Ces derniers, en effet, notamment en DUT, dont 85 % des titulaires continuent leurs études – cela pose d’ailleurs un autre problème –, doivent être accessibles. Or ils ont été élaborés avec l’idée, finalement, de faire des DUT des sortes de classes préparatoires parallèles.

Si j’insiste sur la nécessité d’appréhender le dispositif dans toute sa complétude, dirais-je, c’est que nous avons aussi besoin d’ingénieurs. Il ne s’agit donc pas de « tarir » la population de jeunes susceptible d’aller jusqu’à bac+5. C’est dire l’importance de la modularité et des passerelles envisagées. Quelle que soit la façon dont un jeune est entré dans l’enseignement supérieur, il doit pouvoir être réorienté, au sein des différents établissements, vers le cursus qui va le mieux lui convenir.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne reviendrai que brièvement sur la question des places et des moyens.

Certes, il est toujours possible d’en vouloir davantage, et j’entends cette demande. Je rappellerai tout de même que nous allons avoir 28 000 bacheliers supplémentaires en 2018 par rapport à 2017. Nous avons débloqué des moyens pour ouvrir, dans les BTS, les DUT et les filières en tension, 22 000 places. Sachant que 80 % des bacheliers continuent leurs études dans l’enseignement supérieur, un rapide calcul permet de vous rendre compte qu’avec ces 22 000 places nous sommes globalement en phase avec la réalité. Non seulement nous sommes d’ores et déjà en train de travailler avec l’ensemble des établissements pour savoir où ouvrir ces places et comment, mais nous avons aussi conservé, si je puis dire, une réserve de secours pour qu’il soit possible, si, par hasard, les vœux de cette année ne sont pas ceux de l’an dernier, de réorienter correctement les étudiants concernés.

L’année dernière, les bacheliers qui se sont retrouvés sur le carreau étaient des bacheliers professionnels et technologiques. Pourtant, il restait plus de 3 500 places dans les BTS. Autrement dit, il convient de travailler de manière beaucoup plus fine, pour avoir, bien plus tôt, une visibilité sur les places réellement disponibles. Je ne vous parle pas des places libres, dans les BTS comme dans les IUT, à la rentrée de janvier. Nous devons aussi réfléchir à la possibilité de rentrées décalées, à l’issue de semestres d’orientation, pour que les étudiants retrouvent des places qui leur conviennent.

L’organisation du premier cycle sera profondément repensée. Si je fais le tour de l’ensemble des universités et que je vais voir tous ceux qui étaient encore mes collègues il y a peu, c’est parce que je sais pertinemment que, partout, des dispositifs sont déjà mis en place pour accompagner, en termes de méthodologie, la réussite des étudiants.

Le problème, c’est que nous devons changer d’échelle. Là aussi se pose la question des moyens. Non seulement je vais à la rencontre des présidents d’université, mais je fais en sorte qu’ils puissent partager leurs expériences, parce que ce n’est pas non plus la peine de réinventer, chacun de son côté, un système, qui, par ailleurs, a fait ses preuves et est évalué depuis plusieurs années pour accompagner la réussite des étudiants, notamment celle des bacheliers professionnels et technologiques désireux d’intégrer un cycle licence. Certaines régions, d’ailleurs, apportent à ces derniers une aide substantielle pour ce faire, car elles souhaitent mettre à profit ces nouvelles compétences pour répondre justement au besoin du monde socio-économique de recruter des techniciens spécialisés, c’est-à-dire des bac+2, des bac+3.

Il ne reste que six académies à n’être pas entrées cette année dans le processus permettant aux bacheliers professionnels d’être prioritaires dans l’accueil en BTS au lycée. Nous allons procéder à une première évaluation de ce processus, ce qui aboutira sans doute à le faire progresser.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’évoquerai maintenant la prévention et la santé des étudiants.

C’est un sujet effectivement très particulier : ces derniers étant nombreux à estimer qu’il ne va jamais rien leur arriver, ils en viennent à négliger un certain nombre de données de fond, si je puis dire. Nous voyons ainsi remonter à la surface la problématique des maladies sexuellement transmissibles et une très faible prise en charge des problèmes dentaires ou de vue. Beaucoup d’entre eux abîment leur capital santé alors qu’ils sont jeunes.

Sur ce sujet, qui doit effectivement être pris en main par des professionnels de santé, nous allons soutenir l’ouverture de centres de soins et de santé, dans lesquels ceux-ci pourront venir à la rencontre des étudiants, une après-midi par semaine, avec un système de prise en charge complète par le régime général de sécurité sociale. Il ne sera donc pas nécessaire de faire l’avance des frais.

Un certain nombre de villes, dont une que je connais extrêmement bien, ont justement travaillé avec leur université pour être capable de porter de tels projets, au bénéfice de l’ensemble des étudiants, pas seulement ceux des universités, même si, évidemment, le centre de santé est mis en place au sein de l’université, en liaison avec le CHU.

L’importance de l’accompagnement par les pairs est essentielle. Bien que leur rôle ne soit pas d’être prescriptifs, ceux-ci peuvent nous aider pour savoir par quel chemin, par quel moyen d’information et de communication atteindre véritablement les étudiants.

Puisque Condorcet a été cité, je terminerai par lui. Je connais parfaitement l’ambition qu’il a énoncée : elle a été rappelée, c’est l’égalité des faits, c’est ce que j’avais moi-même la faiblesse d’appeler l’équité. Il s’agit de faire en sorte non pas simplement que les jeunes aient une carte d’étudiant, ce qui n’est pas très compliqué, mais aussi qu’ils entrent dans l’enseignement supérieur pour y obtenir des diplômes, des compétences, des connaissances, qu’ils puissent s’insérer professionnellement, quel que soit le niveau auquel ils aspirent, quel que soit le moment de leur vie.

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