Intervention de Patrice Joly

Réunion du 7 février 2018 à 14h30
Orientation et réussite des étudiants — Article 1er

Photo de Patrice JolyPatrice Joly :

Nous voulons tous ici remédier à l’échec trop important des étudiants dans leur parcours pour accéder à la licence. Toutefois, le dispositif que vous proposez, madame la ministre, notamment pour les filières en tension, n’est pas à la hauteur des enjeux. La possibilité d’un « oui, si » ou d’un « non » introduit un tri des lycéens à travers un certain nombre de filtres. Il s’agit d’une sélection déguisée, qui renforcera les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur au détriment des bacheliers issus des classes modestes et défavorisées, notamment ceux qui sont issus des territoires ruraux.

La question centrale qui doit être posée, et qui est malheureusement insuffisamment traitée par ce texte, est celle de l’égalité des étudiants face aux études supérieures. Si l’on prend l’exemple de la Nièvre, que je connais bien, et celui de la Bourgogne-Franche-Comté, on s’aperçoit que le taux d’accès à l’enseignement supérieur reste inférieur à la moyenne nationale. Cet écart est encore plus manifeste pour les titulaires d’un bac professionnel. En effet, seul un sur deux poursuit une formation post-bac.

La région Bourgogne-Franche-Comté souffre d’un déficit réel en matière de diplômés de l’enseignement supérieur : on observe un écart négatif de plus de 5 % entre la proportion d’une classe d’âge diplômée de l’enseignement supérieur au niveau national et au niveau régional, alors même que le taux de réussite au bac est supérieur à la moyenne nationale. Le principal frein à l’accès à l’enseignement supérieur auquel sont confrontés les jeunes nivernais est d’ordre économique. Le revenu moyen des ménages étant inférieur à la moyenne nationale, la poursuite d’études supérieures d’un ou de plusieurs enfants à l’extérieur de la Nièvre devient vite un poids non négligeable pour les familles, ce qui génère de l’autocensure.

Le territoire doit également faire face à un engagement insuffisant de l’État. À titre d’exemple, l’antenne universitaire de Nevers subit de plein fouet une sous-cotation de la part de l’État, ce qui participe à la désertification de nos territoires, rompant les liens possibles avec les entreprises locales. Parallèlement à cela, les collectivités locales – ville de Nevers, Nevers Agglomération et conseil départemental – contribuent fortement au maintien des sites d’enseignement supérieur, en fonctionnement et en investissement, dans un contexte de fortes contraintes budgétaires. À cela s’ajoute leur participation au financement de la recherche universitaire et au soutien de la vie étudiante et des services aux étudiants.

Il est donc important, dans nos territoires ruraux, de développer une offre de proximité permettant d’améliorer le taux d’accès aux études supérieures, en proposant à la fois une variété de cursus pour les bacheliers et des formations originales attractives en lien avec les potentiels de développement de nos territoires.

Alors que nous avons actuellement tendance à renforcer les grands pôles universitaires dans les métropoles, il est nécessaire de préserver et de renforcer les sites universitaires délocalisés dans les villes moyennes. Ces antennes permettent aux étudiants de suivre leur cursus au plus près de leur lieu de résidence.

Enfin, nous devons absolument travailler sur la question de l’orientation des étudiants et sur les relations entre les universités, les lycées et le monde des entreprises.

C’est un ensemble de mesures que nous devons adopter si nous voulons que nos jeunes soient armés à égalité, quel que soit leur lieu de résidence, pour être en mesure, dès demain, de construire leur parcours, leur vie, leur histoire.

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