J'avoue connaître davantage votre carrière de champion, exceptionnelle, que les missions qui vous sont précisément dévolues comme délégué interministériel. Jusqu'aux années 1990, les clubs sportifs d'envergure nationale se déplaçaient en outre-mer pour recruter des talents et les jeunes sélectionnés partaient en métropole sous leur égide. Désormais, les parents rêvent pour leur enfant un avenir de champion ou, à tout le moins, de sportif professionnel, notamment en football. Malgré des moyens financiers souvent contraints, ils accompagnent leur progéniture sur les terrains, en stage jusqu'en Europe, sans songer au revers de la médaille que représente le taux d'échec élevé à l'issue de ces parcours. À rebours de l'esprit des Creps, qui prône pour les jeunes de moins de seize ans un double projet, à la fois scolaire et sportif, la course au contrat avec un club, chez certaines familles, conduit à privilégier le seul avenir sportif. Or, et notamment à l'arrivée en métropole, les échecs, je le répète, sont fréquents à l'issue d'un essai au sein d'un club. Nous ne disposons hélas pas d'un observatoire chargé de mesurer précisément le taux d'échec des enfants d'outre-mer partis en métropole à la recherche d'un eldorado sportif. Cette veille entre-t-elle dans votre champ de compétence ? Serait-il envisageable, à défaut de disposer directement des moyens d'agir, de vous confier une mission d'alerte sur les risques encourus par des jeunes et des familles souvent mal préparés aux réalités du sport professionnel ? Tant de jeunes de moins de quinze ans s'entraînent quotidiennement sur nos terrains de football ! Le sport n'apparaît plus tant comme un facteur de bien-être et de cohésion que comme un instrument de réussite sociale. Pourtant, moins de 1 % de ces jeunes réussiront un jour à vivre décemment du sport. Il est urgent de mettre en oeuvre une politique de prévention dans ce domaine.