Intervention de Jacques Bigot

Réunion du 22 février 2018 à 14h30
Conflits d'intérêts liés à la mobilité des hauts fonctionnaires — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Jacques BigotJacques Bigot :

Mais posons-nous franchement la question : si quelqu’un choisit d’entrer dans l’une de ces grandes écoles, qui destinent leurs élèves à la fonction publique, ne doit-il pas avoir pour premier objectif de rester dans cette même fonction publique ? Si une personne choisit, à 20 ou 21 ans, de devenir fonctionnaire de cette manière, est-ce pour avoir un excellent diplôme et, ensuite, aller ailleurs pour très bien gagner sa vie ?

On le voit, la question va au-delà du seul sujet des conflits d’intérêts et il nous faudra bien l’aborder. Je cite un autre exemple, également tiré du rapport d’information de l’Assemblée nationale : qu’apporte à la fonction publique le recrutement, en 2016, du directeur général du Trésor comme managing partner au sein d’un fonds d’investissement ? Il a évidemment été choisi en raison de ses compétences, mais aussi de la connaissance qu’il pouvait avoir : les portes ouvertes, les réseaux, les modes de fonctionnement. Est-ce complètement normal ?

Ce n’est pas la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui qui va régler cette question ; même si des amendements sont adoptés, elle ne modifiera qu’à la marge les textes existants, qui permettent déjà de sanctionner d’éventuels conflits d’intérêts.

La déontologie est d’abord une affaire d’état d’esprit et c’est cet état d’esprit qui n’apparaît peut-être pas suffisant, aujourd’hui, dans la haute fonction publique.

Il n’est pas nécessairement mauvais de quitter, un temps, la fonction publique pour le secteur privé, mais à mes yeux, cela doit se faire dans l’idée d’acquérir de l’expérience pour le moment du retour et pas pour satisfaire des intérêts de carrière strictement personnels.

Ces mobilités sont utiles, elles peuvent certes entraîner des conflits d’intérêts, mais nul besoin d’ajouter des dispositions au droit pénal existant, si tant est que les fonctionnaires puissent acquérir, dès leur formation, le sens de la déontologie.

Il faut d’abord nourrir « l’état d’esprit » de la déontologie avant de penser à ajouter encore des articles à la loi, car nous risquons alors, comme le dit le Conseil d’État, de rendre le droit incompréhensible et inapplicable.

Pour cette raison, le groupe socialiste et républicain est très réservé sur cette proposition de loi. Nous attendons de voir ce qu’il en restera avant de nous prononcer, mais nous savons de toute façon, madame la rapporteur, qu’il en restera finalement fort peu…

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