Monsieur le Président, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui un protocole additionnel à l'accord du 9 octobre 1997 conclu à Mondorf entre la France et l'Allemagne. Cet accord est relatif à la coopération transfrontalière entre les autorités de police et les autorités douanières allemandes et françaises.
Ce protocole additionnel met en oeuvre l'article 17 de l'accord de Mondorf de 1997. C'est le premier engagement bilatéral de la France avec pour objet spécifique l'utilisation transfrontalière d'aéronefs. La première question que l'on peut se poser, c'est pourquoi a-t-il fallu près de 20 ans pour rédiger ce protocole additionnel ?
Principalement à cause des restrictions de circulation des aéronefs d'Etat prévues par la convention de Chicago de 1944 relative à l'aviation civile internationale. Or les aéronefs de la police et de la douane sont des aéronefs d'Etat.
On s'est bien sûr également heurté à l'attachement de chaque Etat, à ses pouvoirs régaliens et à sa souveraineté dans son espace aérien.
Si le protocole additionnel a néanmoins été rédigé, c'est parce qu'il s'inscrit dans une relation franco-allemande intense, lancée par le traité de l'Élysée, dont on vient de fêter le 55ème anniversaire. Il y a surtout le contexte d'une coopération transfrontalière policière et douanière exemplaire le long des 450 km de frontière commune. Côté français, cela concerne les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle.
Cette coopération a un caractère opérationnel très marqué, avec des patrouilles mixtes, des centres de commandement communs, la coordination du déploiement des forces, des informations réciproques en matière de recherche et deux centres de coopération policière et douanière (CCPD), l'un situé à Kehl et l'autre au Luxembourg. S'y ajoutent de multiples actions de formation et d'échanges de bonnes pratiques.
Après avoir planté le décor, voyons le contenu du protocole additionnel. Cet instrument a pour objet d'autoriser l'utilisation d'aéronefs au-dessus du territoire voisin par les autorités de police et de douane françaises et allemandes. Cette autorisation facilitera l'exécution de leurs missions de police administrative et judiciaire, de police aux frontières ou de leurs missions douanières. Ces missions incluent les enquêtes judiciaires et douanières, l'observation et la poursuite transfrontalières, la gestion de l'ordre public et de la sécurité publique lors d'événements transfrontaliers de grande envergure - on connait depuis une quarantaine d'années des manifestations importantes devant la centrale nucléaire de Fessenheim auxquelles participent de nombreux manifestants allemands et suisses - le transport de matières nucléaires, les opérations de recherche et de secours aux personnes, ainsi que les exercices communs et les activités de formation.
Le protocole additionnel couvre deux types de situations au titre desquelles des aéronefs d'un État peuvent se trouver dans l'espace aérien ou sur le territoire de l'autre État.
Dans le premier cas, Il s'agit de la prolongation des interventions qui ont débuté sur le territoire d'un État mais qui doivent devenir transfrontalières pour que l'action policière soit efficace. C'est la logique de poursuite de l'action nationale sur le territoire de l'Etat voisin, mais dans le respect de sa souveraineté.
Dans le second cas, il s'agit de l'assistance mutuelle pour la réalisation, dans l'espace aérien ou sur le territoire de l'autre État, des interventions que les moyens aériens de ce dernier ne sont pas en mesure d'effectuer, soit parce qu'ils excédent ses capacités nationales, soit parce qu'ils nécessitent, par nature, la mobilisation conjointe des moyens aériens des deux États. C'est la logique de complémentarité ou de subsidiarité entre partenaires.
Ce protocole met donc en place un régime de circulation aérienne transfrontalière des aéronefs de police et douane, adapté aux contraintes opérationnelles, en vue de garantir la sécurité juridique et physique des vols. Il maintient le principe de respect du droit de chaque Etat au-dessus de son territoire et assimile les équipages des aéronefs voisins aux agents nationaux.
Relativement souple, ce régime ne soumet pas les vols effectués de jour au dépôt d'un plan de vol. Il est en effet difficile d'indiquer à l'avance la durée et le trajet des vols d'aéronefs utilisés dans le cadre de missions de police et de douane.
Ce protocole prévoit en outre que les centres communs de coopération policière et douanière de Kehl et de Luxembourg seront informés des opérations en cours avant le franchissement de la frontière, afin de favoriser la coordination des actions des services opérationnels.
Sur le plan pratique, le présent protocole permettra également aux autorités de police et de douane des deux Etats de disposer de moyens aériens plus importants. Ce qui optimisera le niveau global d'emploi des aéronefs de chaque Etat. C'est un premier pas vers une future mutualisation des moyens, mutualisation qui a commencé sur le Rhin, fleuve international, entre les autorités de police et de douane françaises et allemandes.
Côté français, le groupement des forces aériennes de la gendarmerie de l'Est dispose de cinq hélicoptères, sachant que la brigade de police aéronautique de la direction zonale Est de la police aux frontières loue deux avions CESSNA-172. Côté allemand, les différents services de police disposent de neuf hélicoptères. Cette flotte n'est pas appelée à évoluer à court terme.
En conclusion, je recommande l'adoption de ce projet de loi. Ce protocole additionnel vient parfaire le cadre juridique de la coopération policière et douanière franco-allemande. Il apportera sans conteste d'importants bénéfices opérationnels et aura des conséquences positives sur la sécurité des populations concernées. Ce protocole additionnel ne nécessite pas de modification du droit interne. Enfin, la partie allemande a notifié, en mai 2017, l'achèvement de sa procédure nationale requise pour l'entrée en vigueur du protocole.
L'examen en séance publique est prévu le jeudi 15 février 2018, selon la procédure simplifiée, ce à quoi je souscris.