Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis le plan France très haut débit, nous notons année après année une succession d’appels à projets destinés à l’aménagement numérique et téléphonique de nos territoires.
Je salue bien évidemment les annonces du 14 décembre renforçant le niveau des investissements, ainsi que l’accord du 14 janvier rendant opposables des engagements des opérateurs à des exigences d’aménagement du territoire. Plus que jamais, il est nécessaire de réguler et d’encadrer ces investissements, d’autant qu’ils se déroulent dans un temps particulièrement contraint. Je salue de ce fait l’initiative de notre collègue Patrick Chaize de réaffirmer le rôle central des RIP, de protéger leurs positions dans un secteur mouvant.
Cette proposition de loi témoigne d’une prise de conscience, partagée sur toutes nos travées, que les collectivités locales ont un intérêt stratégique à maîtriser leurs infrastructures. Je suis à ce titre attentif à ce que les opérateurs de RIP ne puissent être soumis à l’IFER, ce qui serait un signal étrange à leur endroit.
Je salue également la réaffirmation du rôle de l’ARCEP. Nous devrons sans doute veiller, chers collègues, lors des discussions budgétaires, à ce qu’elle dispose de moyens suffisants pour accomplir sa tâche.
Mon intervention s’attachera plus précisément à la transition entre les différents projets et la définition des priorités d’action.
Je crois utile de rappeler que la redéfinition des cartes de couverture, issue de la loi Montagne, a été à ce titre déterminante, mais elle n’est pas prescriptive pour déterminer les priorités d’intervention. Je pense que le Sénat pourrait utilement donner quelques indications majeures sur celles-ci, mais, surtout, sur la communication essentielle et continue avec tous les élus.
Premier point, mes chers collègues : nous ne sommes pas sur un terrain totalement vierge. Des projets sont en cours, y compris dans les RIP, et il appartient de donner des perspectives aux projets publics existants, qui craignent – et on les comprend – d’être fortement concurrencés. Je pense aux contrats existants comme celui du syndicat mixte ouvert PACA très haut débit. Il est donc absolument nécessaire de sécuriser, y compris financièrement, les projets en cours. La fermeture du guichet du Fonds national pour la société numérique est source d’inquiétude pour les porteurs de projets anciens, dont le premier plan quinquennal a été acté. Ceux-ci ne disposent pas en effet d’une visibilité financière suffisante, alors qu’ils ont des contrats d’affermage de quinze ans.
Par ailleurs, si ce texte formule des propositions intéressantes pour éviter des doublons inutiles, il apparaît bien nécessaire de prévenir ceux qui pourraient exister non pas entre les RIP et les opérateurs privés, mais bien entre les opérateurs privés eux-mêmes. Ces batailles font perdre du temps et de l’argent.
Deuxième point : veillons à être pleinement acteurs de la priorisation des investissements, y compris en zones très peu denses. Élu de montagne, j’y suis évidemment très sensible.
À cela s’ajoute une autre caractéristique : la possibilité donnée par la loi Montagne de proposer d’autres infrastructures. C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, je souhaite que nous identifiions dès maintenant avec les élus de montagne les endroits où les technologies alternatives pourraient être en priorité déployées ou non et leur articulation avec d’autres choix technologiques, y compris avec un lissage dans le temps.
Autre remarque, et non la moindre : ces investissements attendus dans nos territoires vont s’accompagner vraisemblablement d’une autre concurrence, celle de la main-d’œuvre. Je rappelle que l’observatoire des RIP avait noté une augmentation des effectifs entre 2012 et 2016 de l’ordre de 200 %. L’observatoire indique également qu’il faudrait former 40 000 personnes sur l’ensemble du territoire à l’horizon de 2020, dont près de 20 000 uniquement sur les RIP. Des accords de formations ciblés doivent à mon sens être pris dès à présent, en veillant à la répartition géographique.
Dernier élément et non le moindre : ce service public local, qui est en train de se mettre en place, ne pourra exister sans un plan des usages du numérique. J’ai eu l’occasion de vous remettre, monsieur le secrétaire d’État, des propositions relatives aux maisons de services au public. Je plaide en effet pour que l’accès aux infrastructures numériques s’accompagne notamment de la présence dans les mairies et maisons de services au public de personnels et d’équipements qui permettent d’aller vers ce changement sociétal majeur. Ces infrastructures, mes chers collègues, sont des moyens, jamais des fins.