Intervention de Nicole Duranton

Réunion du 7 mars 2018 à 14h30
Conseil parlementaire d'évaluation des politiques publiques et du bien-être — Discussion d'une proposition de loi

Photo de Nicole DurantonNicole Duranton :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, on ne peut évidemment s’en remettre à la seule création de richesse pour mesurer la bonne santé d’un pays et de ses habitants : il est absolument nécessaire de s’assurer de la pérennité et des impacts des politiques publiques en procédant à leur évaluation.

Ces politiques doivent répondre à un objectif de développement durable, ou soutenable, tel qu’il a été défini en 1987 par la Commission mondiale pour l’environnement et le développement de l’Organisation des Nations unies : « […] Un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ».

Lorsque l’on s’intéresse à un pays, la focalisation sur la seule création de richesses ne reflète absolument pas la réalité du niveau de vie de ses habitants. À l’idée fausse qu’une performance économique entraîne nécessairement une amélioration des conditions sociales, il manque, entre autres, une information sur la répartition de la richesse créée, en écart de rémunération et de patrimoine bien sûr, mais surtout en termes de possibilité pour chacun d’accroître sa rémunération et son patrimoine.

Le critère pécuniaire n’est toutefois pas le seul à prendre en compte dans l’estimation de la qualité de vie d’un individu. Il faut en effet s’intéresser aussi aux facteurs physiques, psychologiques et sociaux, éléments constitutifs du bien-être d’une personne : l’espérance de vie en bonne santé, l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, les liens sociaux, l’accès à l’éducation pour ses enfants, ou encore le respect des droits fondamentaux.

L’idée d’ajouter une telle grille de lecture au calcul de la richesse d’un pays et à l’évaluation des politiques publiques est tout à fait pertinente.

Il est essentiel également d’inclure dans l’analyse des évaluations de soutenabilité des politiques économiques, afin d’avoir une vision plus prudente de leurs résultats. Il s’agirait ainsi de prévenir de nouvelles crises, comme celle qui est survenue en 2008, lorsque les performances en apparence brillantes de l’économie mondiale entre 2004 et 2007 se révélèrent avoir été obtenues au détriment de la croissance à venir.

En ce sens, la présente proposition de loi visant à instituer le Conseil parlementaire d’évaluation des politiques publiques et du bien-être, présentée par notre collègue Franck Montaugé, va dans le bon sens : elle tente d’apporter une réponse à ces différentes préoccupations. Le dispositif proposé, néanmoins, n’est pas satisfaisant.

Il faut avoir en mémoire toutes les expériences précédentes de ce genre qui se sont révélées peu probantes, tels l’OPEL, l’Office parlementaire d’évaluation de la législation, et l’OPEP, l’Office parlementaire d’évaluation des politiques publiques, organes communs aux deux assemblées, créés en 1996 et supprimés depuis lors, après n’avoir publié que très peu de rapports et avoir souffert des discordances entre les majorités respectives des deux chambres.

Au chapitre de ces expériences figure également la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, créée en 2011 et supprimée à son tour par manque de productivité.

Créer encore une nouvelle structure exigera nécessairement un investissement supplémentaire de temps et d’énergie de la part des parlementaires. À force de dispersion, les élus finissent par travailler de manière moins efficace.

Rappelons aussi que la mission d’évaluation des lois et des politiques publiques est normalement la prérogative des commissions permanentes.

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