Intervention de Hervé Maurey

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 7 mars 2018 à 10h30
Questions diverses

Photo de Hervé MaureyHervé Maurey :

Nous avons appris, par voie de presse et avec consternation, le recours à des ordonnances pour l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire... Le président du Sénat a annoncé être totalement opposé au recours à des ordonnances sur ce sujet crucial pour les territoires. J'ai moi-même dénoncé cette démarche. Selon le Gouvernement, cela permettrait d'aller plus vite. Cet argument n'est pas recevable car Louis Nègre et moi-même avions déposé en septembre une proposition de loi sur le sujet. À la demande de la ministre des transports, nous avions accepté de ne pas l'examiner en janvier, en attendant le rapport de la mission Spinetta. Chose extrêmement rare, le président du Sénat a saisi le Conseil d'État sur cette proposition de loi. Ce dernier a rendu son avis le 22 février. Nous étions convenu, avec la ministre, que cette proposition de loi serait le véhicule législatif soutenu par le Gouvernement pour mettre en place la réforme.

Recourir aux ordonnances n'est pas correct vis-à-vis du Sénat, même si ce n'est ni la première, ni probablement la dernière fois. Cette proposition de loi est prête. Les ordonnances ne sont pas une baguette magique : il faut demander l'avis du Conseil d'État, présenter le projet de loi d'habilitation en Conseil des ministres, le déposer devant les assemblées avant le débat. Ensuite, les ordonnances sont signées et doivent être ratifiées...

Le projet de loi d'habilitation pourrait être examiné la semaine du 9 avril à l'Assemblée. La procédure envisagée est particulièrement surprenante. Nous examinerons le projet de loi d'habilitation, mais au fur et à mesure du débat, des dispositions législatives seraient incluses dans la loi d'habilitation : ces dispositions n'auront donc pas été examinées par le Conseil d'État, nous les découvrirons au fil de l'eau, et elles pourront parfois être déposées directement en séance !

Cela s'inscrit dans une série de manques d'attention et de respect à l'encontre du Sénat, comme lors de l'examen des propositions de loi relative à la mise en oeuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes et relative au développement durable des territoires littoraux. Hier, le secrétaire d'État Julien Denormandie estimait que la proposition de loi de Patrick Chaize tendant à sécuriser et à encourager les investissements dans les réseaux de communications électroniques à très haut débit était un texte remarquable, mais qu'il n'était pas débattu au bon moment. Elle a tout de même été adoptée à l'unanimité, et j'en félicite son auteur et son rapporteur...

Mardi prochain, le président du Sénat proposera à la Conférence des présidents d'inscrire la proposition de loi relative à l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs à l'ordre du jour de la séance à partir du 28 mars, pour qu'elle soit votée avant l'examen du projet de loi d'habilitation à l'Assemblée nationale. Cela prouvera qu'on peut aller plus vite tout en respectant les droits du Parlement.

Quel que soit votre avis sur le fond du texte, je vous invite à soutenir cette démarche : s'il y a trop d'obstruction et que le texte n'est pas adopté, nous donnerons raison au Gouvernement. Une durée suffisante a été prévue pour un débat démocratique.

Nous avons quelques divergences avec le Gouvernement, d'abord sur l'annonce gouvernementale de report de l'ouverture à la concurrence de 2019 à 2023. Nous prenons aussi davantage en compte les territoires. Le Gouvernement se fonde sur un open access pur, avec une concurrence totalement libre. Les opérateurs risquent alors de se positionner uniquement sur les TGV ou les lignes les plus rentables. Ils se battront sur le Paris-Lyon, et les autres sortiront leur mouchoir pour pleurer...

Notre proposition de loi met en place un système très important de lots : vous pouvez vous positionner sur le Paris-Lyon, mais en même temps vous devez vous positionner sur des lignes moins rentables, afin que l'ouverture à la concurrence ne se traduise pas par un moindre service rendu aux usagers.

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