Intervention de Gérald Darmanin

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 7 mars 2018 à 16h35
Audition de M. Gérald daRmanin ministre de l'action et des comptes publics

Gérald Darmanin, ministre :

Le Gouvernement a déjà pris des dispositions pour lutter contre la fraude fiscale dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018 et du projet de loi de finances rectificative, mais il compte faire davantage dans le prochain budget. Quelques pistes : nous pourrions pénaliser les montages frauduleux, et non plus seulement la fraude ; utiliser davantage, au sein de la DGFIP, les données comme le big data et les algorithmes ; coordonner les services de renseignement fiscal - Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, Tracfin - et les services de renseignement de la DGFIP ; créer un service de police fiscale, qui n'existe plus à Bercy. Nous aurons l'occasion d'en reparler avec le projet de loi transmis au Conseil d'État.

Sur « Action publique 2022 », je ne suis pas sûr que la comparaison avec le Canada soit pertinente. L'Italie fait par ailleurs des choses intéressantes. Ce que nous avons souhaité, Christine Lavarde, c'est un regard extérieur qui fasse des propositions, lesquelles seront ensuite soumises par le Gouvernement au débat politique, syndical et parlementaire. Il n'y aura pas de projet de loi global, mais les réformes seront portées ministère par ministère, ou par moi-même pour ce qui relève de l'interministériel. Nous n'en avons pas moins avancé sur un certain nombre de réformes auxquelles s'était engagé le Gouvernement : c'est le cas de la réforme de la SNCF, de la formation professionnelle, ce sera le cas de la réforme des retraites, sur laquelle le Président de la République s'exprimera prochainement, et celle de la fonction publique, qui laissera aux fonctionnaires le temps, en 2018, de parler de leur rémunération et de leur statut, comme ont pu le faire les salariés du privé.

Sur l'audiovisuel, Roger Karoutchi, je me garderai bien de donner un avis, sinon pour dire qu'il est celui du Président de la République. Mais je sais que vous êtes bien placé pour sonder les reins et les coeurs. Il est évident qu'il faut réformer l'audiovisuel public qui doit mieux s'adapter au public français, et atteindre une qualité que l'on ne trouve pas dans le privé, qui n'est pas chargé d'une mission de service public. Il est certain, par ailleurs, que la façon dont l'audiovisuel est financé ne correspond pas aux usages puisque seuls ceux qui ont un poste de télévision payent la redevance, alors qu'il existe d'autres façons de regarder les programmes. Cela pose d'ailleurs la question des plateformes internet, qui organisent une gratuité sauvage en récupérant des produits sans qu'il soit tenu compte de leurs coûts de production. Réfléchissons d'abord à la réforme de l'audiovisuel, et l'on calibrera ensuite la réforme des recettes.

Il reste que je constate que le budget de l'audiovisuel public est supérieur à celui de la culture, ce qui doit susciter des interrogations chez les élus des territoires que vous êtes, d'autant qu'une grande partie du budget de la culture va à la région parisienne, voire à Paris seul. Lorsque je suis arrivé aux responsabilités, les trois grands projets qui m'ont été présentés étaient parisiens, ce qui peut conduire à se poser des questions, surtout pour un adepte de la politique culturelle de Malraux.

La question de la dette publique, Sylvie Vermeillet, est importante : elle atteint presque 2 200 milliards d'euros, soit quasiment 100 % du PIB. Nous avons prévu, dans notre trajectoire, une décrue à partir de 2020. Peut-être que sous l'effet de notre politique, et de la croissance, cela viendra plus tôt. Si nous n'avons pas choisi une trajectoire plus sévère, c'est que nous pensons que des ressauts budgétaires sont parfois nécessaires, et qu'il est bon d'investir pour mieux économiser ; c'est le cas des projets informatiques, comme vous le constaterez avec le projet de loi de programmation pour la justice, où vous verrez les efforts que nous entendons faire pour simplifier la procédure pénale, la numériser et économiser du temps, de l'énergie et des agents publics.

Sur les 50 milliards d'euros de la dette de la SNCF, 11 milliards d'euros sont déjà dans la dette publique. Le ministre des comptes publics que je suis a évidemment martelé que sa reprise ne saurait être un préalable à une réforme de l'entreprise. Si tel était le cas, le problème se reposerait dans vingt ans puisque la SNCF produit chaque année entre 2,5 et 3 milliards d'euros de dette. Amorçons sur la réforme de la SNCF courageusement annoncée par le Premier ministre, et regardons, in fine, où on en est.

Lorsque j'ai parlé de taxe foncière améliorée, je voulais seulement dire que des améliorations substantielles sont possibles - le rapporteur général, qui m'interroge souvent sur les valeurs locatives, me comprendra - sans songer à un nouvel impôt. Il ne s'agit nullement de compenser la suppression de la taxe d'habitation pour 80 % des ménages, 3 milliards d'euros d'impôt en moins, comme chacun pourra l'éprouver dès la rentrée.

S'agissant de l'équilibre budgétaire, il est prévu qu'en 2022, nous serons à moins 0,3 % - c'est à dire à 7 milliards d'euros de l'équilibre. Il se peut, si nous gérons bien les comptes publics et que la croissance est au rendez-vous, que nous soyons à l'équilibre, ce qui ne serait pas arrivé depuis quarante ans. Une chose est presque certaine, je serai, sans me rengorger pour autant car on ne tombe pas amoureux d'un chiffre, le premier ministre des comptes publics à avoir contenu le déficit en dessous de 3 % du PIB.

Une augmentation d'un point des taux d'intérêt de la dette signifierait 3 milliards d'euros à payer tout de suite. Ce serait une difficulté, mais je veux vous rassurer : ce que nous avons prévu dans le projet de loi de finances nous laisse une marge.

J'ai mal compris la démonstration qui m'a été faite sur le déficit par Sébastien Meurant. Toutes administrations publiques confondues, le déficit baisse, pour la première fois. Oui, le déficit de l'État augmente, mais parce que c'est l'État qui a opéré presque l'intégralité des baisses de fiscalité, avec la réforme de l'ISF, la flat tax, la taxe d'habitation, pour un total de près de 10 milliards d'euros, et que la hausse des recettes, notamment la CSG, bénéficie à d'autres secteurs de l'administration publique. Il nous a manqué un débat parlementaire pour constater que votre raisonnement est manifestement faux. Je ne peux pas plus vous laisser dire que la dépense publique augmente comme avant. J'aurais aimé tenir la promesse du Premier ministre du 0 % d'augmentation de la dépense publique, et il est vrai que je n'y suis pas totalement parvenu. Il n'est pas facile de baisser la dépense, au même titre qu'il est difficile de maigrir ou de changer ses habitudes, mais je constate que j'ai été le ministre des comptes publics qui vous a proposé, pour la première fois depuis quinze ans, une croissance des dépenses deux fois moindre que celle de ces quinze dernières années. Oui, les dépenses augmentent encore en valeur absolue mais en pourcentage du PIB, la dépense publique baisse.

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