Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, accepter en l’état l’article 1er de ce projet de loi et le contenu de son annexe reviendrait à renoncer, par principe, aux vertus fondatrices du service public à la française.
Dans les faits, au-delà des apparences nécessaires d’une relation courtoise et humaine entre administrés et administration, c’est bel et bien la capacité du service public à agir avec des effectifs de plus en plus réduits – la programmation de 120 000 suppressions de postes, que vous assumez, monsieur le secrétaire d’État, demeurant inscrite à l’arrière-plan du débat – qui est en question.
L’administration de conseil et de service que semble vouloir promouvoir ce projet de loi nous apparaît comme une réponse malthusienne de réduction des services humains, remplacés par des procédures toujours plus automatisées.
C’est non pas l’accumulation des services et leur organisation qui pose parfois problème aux administrés, mais bien plutôt les pressions contradictoires exercées à leur endroit.
Prenons l’exemple des administrations fiscales : ces dernières sont mises en demeure, depuis le vote de la loi de finances rectificative pour 2012, de promouvoir auprès des entreprises le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi tout en luttant contre la fraude fiscale.
Or une activité de contrôle fiscal n’est pas qu’affaire de « gros coups », mais constitue plutôt une activité unissant les services fiscaux, du plus obscur des centres de finances publiques jusqu’aux directions spécialisées les plus pointues, pour faire respecter le principe d’égalité devant l’impôt, principe fondateur de nos valeurs républicaines.
Nous faisons nôtres les préoccupations du Conseil d’État : ajouter aux procédures de l’administration l’exercice du droit au contrôle par le contribuable ou par l’administré en général risque fort de poser des problèmes d’organisation. Ce phénomène a été relevé plusieurs fois par les syndicalistes des finances sur le contrôle fiscal.
Le contrôle fiscal externe a toujours été considéré par les pouvoirs publics comme une vitrine de l’action de l’administration fiscale et de la lutte contre la fraude, une vitrine que chaque ministre et directeur général s’échinent à lustrer, alors qu’il y a de moins en moins de choses en magasin.
Ce qui est en jeu, à travers cet article 1er, c’est non pas la lourdeur de l’administration, mais bien plutôt la résultante des politiques qui, de RGPP – révision générale des politiques publiques – en MAP – modernisation de l’action publique –, ont dissous une bonne partie des pratiques et de l’efficacité de nos services publics.