Intervention de Laurence Harribey

Commission des affaires européennes — Réunion du 15 mars 2018 à 8h35
Questions sociales et santé — Évaluation des technologies de santé : proposition de résolution portant avis motivé de mmes pascale gruny et laurence harribey

Photo de Laurence HarribeyLaurence Harribey :

Pourquoi vous proposer de déposer une proposition d'avis motivé sur ce texte ?

Cinq points sont à souligner. Un groupe de coordination, rassemblant les représentants des États-membres et que la Commission co-présidera, déterminera les technologies devant faire l'objet d'évaluations communes. Le contrôle de la méthodologie et des procédures sera réalisé par la Commission européenne ; les États-membres pourront réaliser l'évaluation des technologies que n'effectue pas le groupe de coordination, mais en respectant la méthodologie et les procédures définies par la Commission ; les États membres doivent obligatoirement reprendre l'évaluation clinique commune dans toute évaluation globale d'une technologie de santé, avec une obligation de notification à la Commission européenne des résultats de l'évaluation dans un délai de trente jours ; le cadre méthodologique de l'évaluation et les procédures sont déterminées par la Commission par le biais d'actes d'exécution. On donne en quelque sorte une procuration en amont à la Commission, pour des actes d'exécution qui ne pourront pas faire l'objet d'un contrôle de subsidiarité ; la Commission fixe les conditions de la coopération avec l'Agence européenne des médicaments pour ces évaluations - alors que ce n'est pas le rôle de cette dernière, censée valider la mise sur le marché des médicaments.

Sur quels fondements juridiques peut-on s'appuyer pour affirmer que la Commission contrevient au principe de subsidiarité ? Tout d'abord, la Commission justifie sa proposition en s'appuyant sur l'article 114 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : celui-ci permet de prendre des mesures permettant le rapprochement des dispositions en vigueur au sein des États membres dans le domaine de la santé, en prenant pour base un niveau de protection élevé. Or, le niveau de protection offert par le présent texte ne peut être apprécié. En effet, les dispositions relatives à la méthodologie pour la réalisation des évaluations cliniques ne sont pas connues à ce jour et ne seront définies qu'ultérieurement dans des actes d'exécution, non soumis au contrôle de subsidiarité.

Selon l'article 6 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, l'Union européenne ne dispose que d'une compétence d'appui en matière de santé humaine, soit une logique de coopération et non d'intégration. De même, l'article 168 dans ses paragraphes 2 et 5 dispose que l'Union européenne encourage la coopération entre les États membres : elle ne peut donc pas l'imposer. Or dans ce cas, la coopération est imposée, dénaturant la compétence communautaire en matière de santé.

Enfin, l'article 168 paragraphe 7 prévoit que l'action de l'Union est menée dans le respect des responsabilités des États membres en ce qui concerne la définition de leur politique de santé. Or ce texte remet en cause les prérogatives des États membres concernant l'organisation et la fourniture de services de santé et de soins médicaux, puisque les évaluations cliniques sont un élément indispensable pour permettre aux États membres de déterminer la politique de tarification et de remboursement des technologies de la santé. Ces évaluations relèvent donc bien de la compétence des États membres.

L'Agence européenne des médicaments a été créée pour garantir des normes élevées de sécurité et de qualité des médicaments. Or, dans ce cas, elle procèderait à une autre mission : la réalisation d'évaluations comparatives nécessaires à la mise en place des politiques nationales de santé, ce qui n'est pas son rôle.

Dans ces conditions, il vous est proposé d'adopter notre proposition de résolution portant avis motivé.

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