Intervention de André Gattolin

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 20 mars 2018 à 14h00
« pour un nouveau modèle de financement de l'audiovisuel public : trois étapes pour aboutir à la création de « france médias » en 2020 » — Présentation du rapport d'information de mm. jean-pierre leleux et andré gattolin

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Il y a un peu plus de deux ans, nous avions présenté ce rapport lors d'une réunion commune des commissions de la culture et des finances. J'étais alors rapporteur spécial du budget de la culture à la commission des finances. Nous avions réalisé une analyse non seulement culturelle, mais aussi profondément économique et technologique de la télévision française et du financement de l'audiovisuel public. Nous vous présenterons la situation ainsi que nos recommandations.

Le secteur de l'audiovisuel a été profondément bouleversé par les évolutions technologiques, par l'arrivée d'acteurs transnationaux et par la révolution des usages et des pratiques qui n'a fait que s'accélérer ces trois dernières années.

Dans les années 1970, on ne comptait que trois chaînes de télévision, toutes publiques - TF1, Antenne 2, FR3 et des radios publiques. Quelques radios privées disposaient de dérogations comme RMC, RTL et Europe 1 et émettaient depuis l'étranger, sous convention. Dans les années 1980, on assiste à une explosion de la FM et des télévisions privées, à la suite de la réforme de 1982.

Depuis 2000, l'offre a été démultipliée avec le développement du câble, du satellite et de l'ADSL. Aujourd'hui, 27 chaînes sont accessibles sur la télévision numérique terrestre (TNT), gratuites, disponibles sur la quasi-totalité du territoire, et de très nombreuses radios sont disponibles sur Internet.

Dernière mutation, « la délinéarisation » permet de réécouter des programmes de télévision ou de radio. L'émergence des plateformes créées par des acteurs internationaux - Netflix, Amazon... - permet d'accéder à des programmes, payants, en tout lieu et à tout moment. Cette forte délinéarisation constitue un péril très sérieux pour les médias traditionnels - le secteur public mais aussi les chaînes privées historiques comme TF1 ou M6.

L'organisation de l'audiovisuel public est devenue archaïque. L'Office de radiodiffusion-télévision française (ORTF) a été créé en 1964, avant que son monopole de diffusion ne soit remis en cause par loi du 7 août 1974. Il n'existait pas de chaînes privées. L'ORTF a été fragmentée en différentes sociétés. Actuellement, le secteur de l'audiovisuel public rassemble moins de 30 % des audiences radio, et encore moins pour la télévision. L'émiettement résultant des lois de 1974, de 1982 et de 1986 - qui ont accru la concurrence - est devenu une faiblesse. Le service public est en difficulté.

Lors de l'adoption de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, ouvrant l'audiovisuel au marché, Internet n'existait pas. Désormais, le secteur de l'audiovisuel traditionnel est « hyper régulé » alors que les plateformes étrangères ne sont soumises à quasiment aucune règle. La directive européenne « Service des médias audiovisuels » (SMA) que la future loi devra intégrer est un début de tentative de régulation sur des acteurs transnationaux passant par des canaux différents, avec d'importants enjeux dans la distribution des chaînes. Même le monopole de diffusion par ondes hertziennes ou la TNT est battu en brèche. La répartition de la valeur va évoluer, avec une concurrence entre éditeurs et distributeurs.

La réglementation de la production audiovisuelle impose aux chaînes des contraintes importantes pour la création mais limite leurs droits sur ces programmes pour l'exploitation et la rediffusion, alors qu'ils sont de plus en plus consommés de manière délinéarisée : les droits des chaînes finançant un programme sont perdus au bout de 36 mois. Une remise à plat de la réglementation est nécessaire.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion