Intervention de André Gattolin

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 20 mars 2018 à 14h00
« pour un nouveau modèle de financement de l'audiovisuel public : trois étapes pour aboutir à la création de « france médias » en 2020 » — Présentation du rapport d'information de mm. jean-pierre leleux et andré gattolin

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Nous proposons une réforme systémique portant à la fois sur la gouvernance, les contenus, les structures et le financement. Il faut repenser la gouvernance pour renforcer l'indépendance et permettre des choix stratégiques. Les entreprises de l'audiovisuel public doivent être bien gérées et ne remplir strictement et uniquement que leur rôle. Elles doivent être regroupées afin de favoriser des mutualisations au travers soit d'une holding - regroupant France Télévisions, Radio France, l'INA, France Médias Monde et Arte France, car Arte Allemagne est aussi sous tutelle des chaînes publiques allemandes ARD et ZDF - soit d'une présidence commune à France Télévisions et à Radio France.

Les dirigeants de l'audiovisuel public doivent être nommés par les conseils d'administration des entreprises selon le droit commun plutôt que d'émaner du CSA, organisme de régulation, de contrôle voire de sanction. Il est difficile à la fois de nommer et de contrôler.

La tutelle de l'État doit être allégée pour préserver l'indépendance. Les conseils d'administration comptent quatre - pour Radio France - ou cinq - pour France Télévisions et France Médias Monde - représentants de l'État, tenant souvent des discours contradictoires. L'Agence des participations de l'État (APE) pourrait se substituer aux ministères de la culture et des finances dans les conseils d'administration. L'État aurait deux représentants et le conseil d'administration serait davantage ouvert à des personnes disposant de compétences spécialisées, afin de prendre de vraies décisions. Réduisons la représentation de l'État, sans toucher à la représentation syndicale.

Ayons des contenus véritablement distincts de ceux des médias privés. Tous les ans, le CSA publie une étude sur la réalisation des contrats d'objectifs et de moyens des grandes sociétés publiques, notamment France Télévisions. Celle du 27 octobre dernier sur France Télévisions dénonçait le manque de différenciation des programmes entre chaînes publiques et entre France Télévisions et l'offre privée. Cette distinction doit exister. Sur France 2 et France 3, il y a chaque jour neuf heures d'émissions de jeux - et un seul concept français, « Des chiffres et des lettres ». Est-ce la vocation du service public de diffuser neuf heures de jeux quotidiens ?

Jean-Pierre Leleux propose d'interdire la diffusion de films et séries américaines sur France Télévisions, comme le fait la BBC. Je pense qu'elle devrait au moins être régulée. La télévision publique finance de nombreux programmes patrimoniaux - documentaires, séries, films de télévision - et de cinéma. Pourquoi recourir autant en prime time à des émissions d'origine anglo-saxonne ?

La publicité pourrait être supprimée sur le service public, sachant que son produit décroît. De plus en plus, la publicité s'intéresse aux données personnelles. Ce n'est pas le rôle du service public, qui doit conserver l'anonymat des données. Réservons la publicité traditionnelle aux chaînes privées et trouvons d'autres formes de financement, comme les ressources liées aux droits.

Une plus grande exigence doit caractériser la programmation afin de renforcer l'attractivité des créations audiovisuelles. Les précédentes lois prévoyaient de favoriser la diffusion et l'accessibilité de la culture. Ces émissions sont de plus en plus rares. France Télévisions diffuse douze pastilles sur les livres et France 5 possède une seule émission littéraire, « La grande librairie ».

Il faut aussi attirer des publics jeunes, qui ne regardent plus la télévision publique, ni les chaînes traditionnelles. De nouveaux comportements médias apparaissent en Suisse et au Danemark, la redevance est contestée. Au Danemark, les moins de 35 ans ne regardent plus la télévision classique. Le service public doit être réactif et proposer des contenus et des programmes sous différentes formes, tout en abreuvant tous les publics de contenus, plutôt que de réserver la télévision aux plus de 60 ans.

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