Intervention de Cyril Pellevat

Réunion du 20 mars 2018 à 9h30
Questions orales — Situation du tribunal de thonon et de la cour d'appel de chambéry

Photo de Cyril PellevatCyril Pellevat :

Madame la présidente, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, en février 2017, j’avais alerté le garde des sceaux du précédent gouvernement sur la situation du tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains et attiré son attention sur les faibles moyens financiers et humains de ce tribunal, submergé par son activité. En effet, c’est surtout en matière d’effectifs humains que la situation est difficile.

Le tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains est en tête des tribunaux les plus démunis de France. Le rythme y est intense : de dix à quinze audiences par semaine. L’activité judiciaire est foisonnante, la juridiction thononaise étant la plus chargée du ressort de la cour d’appel de Chambéry et le principal pourvoyeur des affaires criminelles aux assises et de la maison d’arrêt de Bonneville.

En 2017, le tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains rendait quelque 7 557 décisions de justice, contre 5 695 en 2016. Le volume de l’activité contentieuse de ce tribunal est le plus important du département ; il est supérieur à celui du tribunal de grande instance d’Annecy, et c’est celui qui connaît la plus forte croissance démographique. Le supprimer est une hérésie !

Le territoire de la Haute-Savoie est l’un des plus attractifs de France : la population y a augmenté de plus de 20 % en moins de dix ans.

Il conviendrait de donner davantage de moyens à ce tribunal, pour une justice plus rapide et efficace. Comme vous le savez, nous avons craint la suppression de la cour d’appel de Chambéry. Pour certains habitants de Haute-Savoie, la suppression de cette cour d’appel aurait représenté un trajet de plus de deux heures, puisqu’ils auraient désormais dû se rendre à Grenoble.

Que ce soit pour le tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains ou la cour d’appel de Chambéry, une suppression conduirait à un désert judiciaire que nous ne pouvons pas accepter.

Plus de 250 avocats des cinq barreaux des deux Savoie ont fait grève le 15 février dernier, et j’étais à leurs côtés. En Haute-Savoie, la mobilisation des avocats du barreau de Thonon-les-Bains, du Léman et du Genevois fut grande. Et c’est désormais les quinze barreaux de la Conférence des bâtonniers de la région Rhône-Alpes qui, représentés par Mme le bâtonnier Laurence Joly, ont décidé la semaine dernière la grève des désignations pénales à compter de cette semaine et pour une durée indéterminée. Ces grèves sont la conséquence du fait qu’aucune concertation n’ait vu le jour.

À plusieurs reprises, madame la garde des sceaux, vous nous avez assuré qu’aucune juridiction ne fermerait. L’avant-projet de loi de programmation pour la justice 2018–2022, que j’ai pu me procurer, semble en effet maintenir l’ensemble des tribunaux de grande instance et cours d’appel existants, et la Chancellerie ne parle plus de juridictions départementales ou de proximité.

En revanche, l’article 54 de l’avant-projet de loi précise que des tribunaux de grande instance, dont la liste sera fixée par décret, se verront attribuer des contentieux au civil et au pénal, dont la liste sera également fixée par décret : voilà qui ne me rassure pas sur l’avenir du tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains – ni d’autres juridictions.

La départementalisation reste donc d’actualité, qui dépouillera les tribunaux de grande instance de leurs contentieux au profit des tribunaux de grande instance départementaux. Même si vous ne fermez pas les premiers, permettez-moi d’espérer que votre objectif n’est pas de les dévitaliser… Si tel n’est pas le cas, comptez-vous augmenter les moyens humains et financiers de ces juridictions, ou prendre d’autres dispositions en leur faveur ?

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