« Retrouver l’esprit de Rome », plaidait, en février 2017, le rapport du Sénat sur l’état de l’Europe.
Le Brexit, tout autant que les doutes de nos concitoyens exigent que l’on refonde une Europe déjà en crise. C’est cette priorité qu’ont réaffirmée le Président de la République et la Chancelière à Paris, vendredi dernier.
Le rapport du Sénat disait qu’il fallait retrouver un leadership : le couple franco-allemand est désormais à nouveau sur pied. Alors, halte aux dérives bureaucratiques, repoussoir du projet européen, recentrons-nous sur l’essentiel : une Europe offensive, centrée sur ses vraies priorités ! Mon collègue Bonnecarrère les a rappelées : la sécurité, l’emploi, l’immigration, les investissements d’avenir.
L’alternative, mes chers collègues, est claire : le sursaut ou la sortie de l’histoire. En 2050, aucun État européen ne pèsera plus de 1 % de la population mondiale. Seule l’Allemagne fera encore partie des dix premières puissances économiques mondiales. C’est donc à travers l’Union européenne, et elle seule, que les États européens pourront continuer à vivre. C’est aussi en regroupant ses forces que l’Europe pourra préserver son modèle de société et défendre ses valeurs.
Porté par les États-nation, le projet européen doit être renouvelé. Le Sénat avait tracé la « feuille de route » de ce nouveau départ, largement repris dans le discours de la Sorbonne par le Président de la République. Nous ferons mi-avril, avec mon collègue et ami le président Bizet, au sein de notre groupe de suivi du Brexit, le point sur la mise en œuvre de cette « feuille de route » que nous proposerons à l’exécutif.
En quoi l’ordre du jour du prochain Conseil européen nous rapproche-t-il de cette exigence de refondation ? Je laisse à Jean Bizet le soin de s’exprimer, en notre nom à tous les deux, sur la renégociation du Brexit à proprement parler ; je ne ferai que deux remarques, qui recouvrent, mais différemment, les propos de l’orateur précédent.
Ma première remarque a trait aux Balkans occidentaux.
Dans l’ordre du jour, on trouve en effet un point concernant les négociations d’adhésion en cours avec la Serbie et le Monténégro. L’ouverture prochaine de négociations avec l’Albanie et l’Ancienne République yougoslave de Macédoine est envisagée, tandis que la perspective européenne semble plus éloignée pour la Bosnie-Herzégovine et le Kosovo.
Bien sûr, personne ne peut nier la dimension historique et géopolitique de ce processus, dans une région longtemps qualifiée de « poudrière », où les rivalités stratégiques ont toujours été fortes, avec des jeux d’influence russes, turcs, élargis maintenant à la Chine. C’est dans cette région que la Première Guerre mondiale, dont nous commémorons cette année le centenaire de l’armistice, a démarré. C’est également là que s’est déroulé le premier et dernier conflit majeur qu’ait connu l’Europe à ce jour depuis la Seconde Guerre mondiale.
Mais si l’Union européenne devait s’élargir aux Balkans occidentaux, ce devrait être plutôt pour consolider l’ensemble européen et non pas pour le déstabiliser. Or, franchement, madame la ministre, je vous le demande, la relance de l’élargissement est-elle vraiment souhaitable, au moment même où l’Europe doit se concentrer sur sa refondation, et alors que nos capacités financières vont être réduites par le Brexit ?