Cet amendement tend à supprimer les alinéas 13 à 16 du présent article, afin de rétablir la rédaction résultant des débats de l’Assemblée nationale.
Le Gouvernement est défavorable à la rédaction du II et du III de l’article 11, tels qu’ils résultent des travaux menés par le Sénat en commission, car cette réécriture a pour effet d’empêcher l’open data des décisions de justice. À cet égard, l’amendement du Gouvernement rejoint les amendements déposés par M. de Belenet, M. Patriat et Mme Benbassa.
J’en suis certaine, tel n’est pas l’objectif de ces dispositions, qui s’inspirent d’ailleurs de la proposition de loi déposée en juillet 2017 par M. Bas.
La rédaction proposée par la commission des lois impose que la diffusion des décisions de justice prévienne tout risque de réidentification. Il s’agit là d’un objectif impossible à atteindre, sauf à effacer des parties entières des décisions de justice avant leur diffusion au public. Ces décisions seraient alors complètement illisibles et donc totalement inexploitables. Mon analyse est d’ailleurs confirmée par le rapport que M. Loïc Cadiet m’a remis le 9 janvier dernier, et auquel il a été fait allusion, à la suite d’une mission consacrée à l’open data des décisions de justice.
Dans son rapport, M. Cadiet rappelle que la prévention absolue de la réidentification est impossible en pratique, car les décisions de justice sont des documents très construits, qui contiennent de nombreuses données réidentifiantes.
Si une prévention absolue du risque de réidentification est imposée par la loi, l’open data des décisions de justice ne pourra tout simplement pas être assurée.
Au demeurant, le rapport de M. Cadiet apporte cette précision : la mission déduit de ces éléments que la prévention de la réidentification constitue une obligation de moyen, et non de résultat. Cette analyse est approuvée par la CNIL et par les cours suprêmes, qui ont concouru à cette mission.
Il faut donc aller, me semble-t-il, vers une protection adaptée de la vie privée des personnes concernées par les décisions de justice. Les mentions d’identification contenues dans les décisions doivent être supprimées et la réidentification doit être, bien entendu, difficile à effectuer.
La rédaction actuelle des articles L. 111-13 du code de l’organisation judiciaire et L. 10 du code de justice administrative, telle qu’elle résulte de la loi pour une République numérique, me semble adaptée à cette recherche d’équilibre.
Enfin, la loi pour une République numérique a renvoyé à un décret en Conseil d’État le soin de préciser les modalités selon lesquelles sera assurée la protection des identités des professionnels de la justice. Ce décret est en cours d’élaboration. En effet, la réflexion n’est pas encore aboutie sur ces questions délicates.