Ces trois amendements posent une question, qui dépasse le seul contexte des infractions sexuelles sur mineurs. Notre droit, au contraire du régime juridique anglo-saxon, fait dépendre le délai de prescription de la gravité des faits. Je ne partage pas entièrement les arguments développés par François Pillet mais, en matière de hiérarchie des infractions, l'imprescriptibilité proposée interroge. Pourquoi l'assassinat de dix personnes serait-il plus rapidement prescrit qu'une infraction sexuelle sur mineur, aussi grave soit-elle ?
Avec ces amendements, nous tournons en réalité autour de la question complexe de l'amnésie traumatique et de ses conséquences sur la prescription. La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) s'est, dans un arrêt du 22 octobre 1996, prononcée sur le délai de prescription des infractions sexuelles commises à l'encontre des mineurs : après un certain délai, les faits ne peuvent plus être jugés sans remettre en cause le droit au procès équitable. Nous sommes toutefois déjà, pour ces infractions, dans un régime juridique dérogatoire, puisque le délai de prescription ne court qu'à compter de la majorité de la victime, qu'il a récemment été doublé et que nous nous apprêtons à l'allonger encore. N'allons pas au-delà !
Au regard du grand nombre de signataires de ces amendements appartenant à la majorité sénatoriale, je m'interroge cependant sur la position de cette dernière sur la question qu'ils soulèvent. Quoi qu'il en soit, le groupe socialiste et républicain y est défavorable.