Cet article tire les conséquences de l’ouverture à la concurrence des services conventionnés en permettant le transfert des cheminots vers les entreprises qui auront remporté le marché.
Si l’attaque contre le statut des personnels n’est pas aussi frontale que celle orchestrée au travers du projet du Gouvernement et du rapport Spinetta, on voit bien, toutefois, qu’il s’agit ici de mettre le doigt dans l’engrenage de la suppression du statut.
Au fil de l’attribution des différents marchés, de plus en plus de cheminots statutaires se trouveront écartés de leur entreprise. Une telle démarche condamne évidemment le statut à petit feu. Pis, l’avis de ces cheminots comptera peu dans le processus, car s’ils refusent le transfert, il sera purement et simplement mis fin à leur contrat. Il s’agit là d’une attaque sans précédent contre le statut des cheminots, qui garantit la continuité de l’emploi public. Aucune obligation de reclassement au sein de la SNCF n’est prévue : il s’agira, pour les cheminots concernés, d’un départ non négociable.
Toutes ces dispositions sont scandaleuses et prolongent au fond le plan social engagé à la SNCF, où le nombre d’emplois publics diminue constamment depuis des décennies. Les pouvoirs publics font des cheminots les boucs émissaires de tous les maux qui affectent le transport ferroviaire. C’est un chiffon rouge bien utile pour détourner les regards des véritables problèmes, comme celui de la dette ferroviaire, bien plus grave et inquiétant pour les comptes publics.
Les cheminots sont loin d’être les privilégiés que certains se plaisent à décrire : salaires bas, travail la nuit et le week-end… Le peu de concertation avec les syndicats sur cette proposition de loi est éloquent : seuls deux des quatre syndicats représentatifs ont été auditionnés par le rapporteur. Plus globalement, au lieu de tirer les conditions sociales vers le bas et d’organiser le dumping social entre salariés du rail, ainsi qu’entre salariés du rail et salariés de la route, il est temps d’aller vers l’instauration d’un statut unique pour tous les travailleurs du secteur des transports. Ce serait de nature à encourager la négociation avec les partenaires sociaux et à ouvrir la voie à une réforme ferroviaire qui ne signe pas la condamnation du service public et permette d’en finir avec l’avantage concurrentiel de la route.