Intervention de Patricia Ferrand

Commission des affaires sociales — Réunion du 4 avril 2018 à 10h00
Réforme de l'assurance chômage — Audition de Mme Patricia Ferrand présidente jean-michel pottier vice-président et M. Vincent deStival directeur général de l'unédic

Patricia Ferrand, présidente de l'Unédic :

Jean-Michel Pottier a mis les mots qui conviennent sur les craintes qu'éprouvent les partenaires sociaux s'agissant du financement et de la mise à mal du paritarisme, ainsi que du rôle des corps intermédiaires dans la société française.

Toutes les organisations font la même analyse. On nous dit que l'Unédic n'est pas modifiée dans sa dimension institutionnelle et statutaire, pas plus que dans ses missions. Cependant, le périmètre de négociation est restreint par l'encadrement qui en est fait. En outre, le Gouvernement décidera des règles durant une période transitoire, ce qui interroge sur la volonté de prendre ou non en compte l'avis des partenaires sociaux. C'est donc bien le paritarisme de négociation qui est aujourd'hui « sur la sellette ».

S'agissant des questions financières, et notamment celle de la suppression de la cotisation salariale, qui signifierait la mort du paritarisme, les organisations syndicales ont des visions différentes à ce sujet, mais se retrouvent néanmoins sur certains points. Il n'y a pas que la cotisation qui justifie la participation à la négociation.

En matière de création de la norme, la valeur ajoutée des corps intermédiaires, en particulier les organisations syndicales et patronales, vient du fait que ceux-ci connaissent les réalités du terrain. C'est cette essence-là qui est en jeu. La formation professionnelle n'est financée que par une cotisation patronale. Il faut donc bien établir la distinction entre le rôle de la négociation et la nature du financement. Malgré tout, les organisations syndicales revendiquent, pour l'ordonnance chômage, le maintien du caractère contributif basé sur des cotisations à la fois salariales et patronales.

Vous avez posé une question essentielle sur la volonté de baisser le coût du travail pour des raisons de compétitivité, ce que permettait en partie la suppression des cotisations salariales. Même si on peut estimer qu'il s'agit d'une mesure en faveur du pouvoir d'achat, c'est bien une question de philosophie et de nature du régime.

Aux risques liés au travail correspondent des droits basés sur les cotisations du travail. En revanche, aux risques universels -qui ne sont pas liés au montant des cotisations- correspondent des prestations universelles. Quand on est atteint d'un cancer, on ne regarde pas le montant des cotisations : tout le monde a droit à la même chose. On n'est pas du tout sur la même nature de risques, et c'est bien là la différence entre les prestations universelles et les prestations d'assurance chômage.

J'entends parfaitement la question de la compétitivité qui est posée par certains d'entre vous : il était possible d'établir un swap entre les cotisations, de rendre la maladie complètement universelle et de la financer par la CSG, afin de permettre le gain de pouvoir d'achat pour les salariés, voulu par le Président de la République, tout en conservant la philosophie des régimes, c'est-à-dire un financement par l'impôt pour les prestations universelles et un financement contributif pour les prestations liées au travail.

D'où vient le financement de l'opérateur Pôle emploi qui assure auprès des demandeurs d'emploi à la fois l'indemnisation et l'accompagnement dans une recherche d'emploi ? La loi de création de Pôle emploi, en 2008, précise que les partenaires sociaux doivent financer au minimum Pôle emploi par 10 % des cotisations qu'ils collectent dans le cadre du régime d'assurance chômage, soit 3,5 milliards d'euros. Le budget de fonctionnement de Pôle emploi s'élève à 5 milliards d'euros. Un tiers de cette somme provient de l'État, le reste de l'Unédic.

Ceci s'explique par la structuration antérieure et l'idée que la sécurisation des personnes qui perdent leur emploi n'est pas seulement assurée par une indemnisation, mais aussi par un accompagnement et des dépenses actives -d'où la justification du financement de Pôle emploi par l'Unédic. Ces dernières années, les partenaires sociaux ont discuté sur cette part des deux tiers qui paraît relativement excessive, pèse sur les finances du régime, et pourrait être assurée plus largement par l'État.

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