Intervention de Alain Richard

Délégation aux collectivités territoriales — Réunion du 5 avril 2018 : 1ère réunion
Table ronde « responsabilité pénale des élus et déontologie »

Photo de Alain RichardAlain Richard, rapporteur :

Cela permet déjà de cerner un peu le sujet.

Évitons toute déclaration alarmiste : il doit y avoir de nombreux cas de classements sans suite. Certes, l'élu mis en cause connaît un traumatisme, mais le classement sans suite est la reconnaissance que la demande de poursuite n'était pas justifiée.

La loi est-elle fautive ? Autorise-t-elle des cas de mise en cause qui, éthiquement et socialement, ne sont pas totalement justifiés ? Cela exigerait que l'on modifie les textes de droit pénal, ce que nous ne faisons pas de manière banalisée.

Par ailleurs, se posent la question du mode d'appréciation des juges et celle de la formation d'une jurisprudence qui méconnaîtrait la composante d'éléments volontaires ou, en tout cas, délibérés ou conscients de la faute. Il faut poursuivre cette réflexion.

Même si les circonstances sont de la souveraineté de la cour d'appel, concernant l'affaire des branchements électriques citée précédemment, la mention dans un attendu de la cour d'appel d'une affirmation générale suivant laquelle un élu de petite commune serait astreint à un niveau de présence accru est une erreur de droit. Celle-ci n'a peut-être pas été soulevée au moment du litige, mais la Cour de cassation aurait pu le relever, car c'est une erreur de droit.

La dérive vers des reconnaissances de culpabilité à partir d'éléments strictement non intentionnels doit donner lieu à un débat au sein de la magistrature pénale, débat auquel la DACG n'est pas totalement étrangère. Reconnaître le caractère administratif de cette direction, qui est, me semble-t-il, chargée de proposer au Gouvernement l'évolution de la politique pénale, est tout de même un peu réducteur.

Pour siéger à la Commission supérieure de codification, je souligne le nombre de séances consacrées à essayer de construire depuis vingt-cinq ans qu'on nous le demande le code de la commande publique. La marge d'incertitude sur ce qui est correct et ce qui ne l'est pas continue de se creuser. Tous les services administratifs des collectivités chargées de préparer les opérations de commandes publiques appellent les élus à l'absence totale de choix. On vous invite à ne pas porter une appréciation qui vous apparaît raisonnable dans la façon de coter les éléments de mérite de telle ou telle proposition dans le cadre d'un appel d'offres, mais qui n'a pas été ratifiée par la jurisprudence. Les commissions d'appel d'offres deviennent de plus en plus des témoins muets d'un décompte purement technique et formel qui empêchent de choisir la meilleure offre.

Je rejoins les propos de Franck Montaugé ; l'une des missions essentielles des établissements publics de coopération intercommunale est de mutualiser de façon pratique l'ingénierie. Au fond, l'AMF a-t-elle fait son travail de garantie mutuelle ? Le risque pénal n'est effectivement pas assurable - et c'est heureux ! En revanche, la protection pénale est mutualisable.

Dans le monde enseignant, des mutuelles assurent, depuis une dizaine d'années, la protection juridique professionnelle : elles sont un élément de sécurisation et de prévention. La constellation des organisations d'élus ne pourrait-elle pas se pencher sur ce sujet ? La mutualisation des collectivités serait de nature à assurer un niveau de protection juridique plus professionnalisé que ce que nous faisons au travers des associations départementales.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion