Intervention de Valérie Albouy

Commission des affaires sociales — Réunion du 11 avril 2018 à 9h35
Politiques de lutte contre la pauvreté — Audition de Mme Valérie Albouy de l'insee et de Mme Hélène Périvier de l'observatoire français des conjonctures économiques

Valérie Albouy, cheffe du département des ressources et conditions de vie des ménages à l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) :

Je suis chargée de la production des statistiques sur le revenu et les conditions de vie à l'Insee. La France a un dispositif de statistiques sur le revenu de qualité par rapport à nos voisins européens, fondé sur des enquêtes, des données fiscales et celles transmises par les caisses de prestations sociales. Les revenus sont mesurés annuellement. Comme partout en Europe, la mesure de la pauvreté en France est relative : le seuil de pauvreté est défini à 60 % du niveau de vie médian de la population, 50 % pour le taux d'extrême pauvreté - chiffre parfois retenu à l'étranger. Attention, le niveau de vie est non seulement calculé sur les revenus mais aussi sur la composition familiale avec l'attribution d'un coefficient spécifique selon la taille de la famille. Dans la presse, les chiffres mentionnés concernent une personne célibataire. Les derniers chiffres disponibles sont fondés sur les revenus de 2015 à partir des déclarations fiscales établies sur les revenus de l'année précédente.

Le taux de pauvreté s'élève en France à 14,2 %. Le niveau de vie médian - qui coupe la population en deux - s'élevait à 20 300 euros annuels, soit environ 1 700 euros par mois pour un célibataire. Pour un couple avec deux grands enfants - le coefficient dépend de l'âge des enfants - il est de 42 000 euros par an, soit 3 500 euros par mois. Le niveau de vie médian en 2015 est légèrement inférieur à celui de 2008, soit avant la crise économique.

Une personne pauvre avait un niveau de vie inférieur à 1 015 euros par mois en 2015, un couple sans enfant 1 500 euros, un couple avec deux enfants 2 100 euros. Le risque de pauvreté dépend de multiples facteurs. Les deux plus importants sont le chômage et la structure de la famille. Une personne au chômage a un risque de vivre dans un ménage pauvre de 38 %, contre 14 % pour le reste de la population. Une personne vivant dans une famille monoparentale a un risque de pauvreté de 35 %, celle vivant dans une famille de plus de trois enfants de 40 % et le taux augmente très vite avec le nombre d'enfants. La France a l'un des taux de pauvreté les plus bas de l'Europe mais ce niveau dépend aussi du niveau de richesse du pays. De nombreux pays ont un seuil plus bas qu'en France où la distribution des revenus est moins inégalitaire que dans de nombreux pays européens.

Entre 2008 et 2011, le taux de pauvreté s'est fortement accru, de 1,4 point sur toute la période. Entre 2011 et 2015, il s'est stabilisé et a même légèrement décru de 0,4 point. Le taux actuel est donc supérieur d'un point à celui de 2008. Dans de nombreux pays européens, le taux de pauvreté s'est davantage accru qu'en France.

Le visage de la pauvreté a beaucoup changé. La pauvreté des retraités a fortement décru, passant de 31 % en 1970 à 11 % en 1984, en raison de l'arrivée à la retraite de personnes ayant des droits à la retraite, de la revalorisation des minima sociaux et notamment du minimum vieillesse. Le taux d'extrême pauvreté est passé de 23 à 5 % parmi ces populations. Depuis quelques années, la pauvreté touche davantage les ménages actifs, les jeunes et les familles monoparentales.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion