Madame la présidente, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, le mercredi 14 mars 2018, la commission mixte paritaire réunie sur le projet de loi ratifiant l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, après deux lectures dans chaque assemblée, est parvenue à un accord.
Je salue à ce titre la qualité du travail commun réalisé avec nos homologues de l’Assemblée nationale, en particulier avec le rapporteur du texte Sacha Houlié, de même que celui qui a été effectué avec le Gouvernement, dans un esprit très constructif.
Trois dispositions étaient encore en discussion lors de cette commission mixte paritaire : la caducité de l’offre de contrat en cas de décès de son destinataire ; les clauses pouvant être contestées en raison d’un caractère prétendument abusif dans les contrats d’adhésion ; enfin, la révision judiciaire du contrat à la demande d’une seule des parties en cas de changement de circonstances imprévisible.
La commission mixte paritaire a retenu la position du Sénat sur les deux premiers points et nous nous en sommes remis à celle de l’Assemblée nationale sur le troisième.
La plupart des apports du Sénat en première lecture ont été conservés ; il est vrai que, pour ne pas contribuer à l’instabilité du droit, ils étaient limités à la correction des malfaçons et des difficultés d’interprétation les plus fortes.
Parmi les apports du Sénat, citons en particulier la nouvelle définition du contrat d’adhésion et le champ de la sanction des clauses abusives dans ces contrats ; la mise en cohérence de l’obligation précontractuelle d’information et de la définition de la réticence dolosive ; la meilleure articulation des règles en matière de capacité et de représentation avec le droit des sociétés ; les critères autorisant le paiement en devises sur le territoire français, en accord avec les pratiques jusque-là admises ; ou encore l’affirmation claire selon laquelle la loi nouvelle ne doit pas s’appliquer aux contrats conclus avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance.
La commission des lois avait par ailleurs levé plusieurs difficultés d’interprétation, sans modifier le texte, en précisant, dans le cadre des travaux préparatoires, le sens qu’il convenait de donner à certaines dispositions. Ces interprétations ont été partagées par le Gouvernement et l’Assemblée nationale.
Sur la révision judiciaire du contrat pour imprévision à la demande d’une seule des parties, nous savons bien que cette innovation, critiquée, sera systématiquement écartée dans les contrats où les parties seront bien conseillées… Cette innovation restera donc, à notre avis, sans grande portée.
Ce débat aura eu le mérite de mettre en lumière le caractère éminemment politique de la réforme du droit des contrats, réalisée par ordonnance au prétexte qu’elle était technique, alors qu’il s’agissait en réalité de faire de vrais choix politiques, dont le Parlement a été dessaisi et sur lesquels nous avons décidé de ne pas revenir.
Cela nous donne matière à réflexion pour le futur, en particulier pour la réforme de la responsabilité civile, au moins aussi importante que celle du droit des contrats. Le Sénat s’en est d’ailleurs déjà saisi, puisque mon collègue Jacques Bigot et moi-même venons d’engager une mission d’information sur le sujet.