Madame la présidente, madame la garde des sceaux, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, à la différence des pays placés sous le régime de la common law, la France est un pays de droit écrit au sein duquel sont garanties l’accessibilité de la norme et la sécurité juridique.
Pourtant, paradoxalement, notre droit des contrats et notre régime des obligations souffrent, depuis de nombreuses années, d’une imprévisibilité et d’un manque crucial de lisibilité, plusieurs dispositions étant clairement obsolètes.
En 2004, à l’occasion du bicentenaire du code civil, un projet de réforme du droit des contrats avait été annoncé.
C’est ce long processus que nous allons aujourd’hui clore, en ratifiant l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations.
Sur la forme, et c’est aussi un véritable problème de fond, le Sénat s’était opposé de nouveau – et à juste titre ! – au recours aux ordonnances, estimant que cette voie n’était pas justifiée pour une réforme qui n’était pas uniquement technique, mais reflétait aussi des choix de nature éminemment politique.
Sachez-le tout de même, la marge de manœuvre des parlementaires était d’autant plus réduite que nous avons dû ratifier cette ordonnance plus d’un an après son entrée en vigueur.
En dépit de ces problèmes récurrents, le Sénat a fait preuve de responsabilité en s’attachant à clarifier le texte de l’ordonnance sans en modifier le sens, ni l’esprit.
Sur le fond du sujet, nos deux assemblées se sont accordées sur le caractère essentiel d’une réforme unanimement saluée par les acteurs du droit.
Cette ordonnance présente un double objectif : il s’agit de renforcer, d’une part, l’attractivité du droit français, d’autre part, la sécurité juridique du droit des contrats, en améliorant tant sa lisibilité que son accessibilité.
Le texte de l’ordonnance porte ainsi la consécration de mécanismes juridiques issus de la pratique, comme la cession de dettes ou la cession de contrats, tout en les simplifiant. Nos deux assemblées ont convergé sur de très nombreux points, en s’accordant sur la clarification de la définition du contrat d’adhésion et sur l’amélioration de la lisibilité du mécanisme de la réduction du prix. Les solutions innovantes introduites par l’ordonnance ont été évidemment les points les plus débattus.
Deux d’entre elles, la prohibition des clauses abusives dans un contrat d’adhésion et la révision judiciaire pour imprévision, restaient encore en discussion lors de la commission mixte paritaire.
Il s’agissait également de trouver un accord concernant la caducité de l’offre à la suite du décès de son destinataire.
Sur ces trois sujets, la commission mixte paritaire est parvenue à la conclusion d’un accord, ce dont nous nous félicitons sincèrement. Je tiens ici à saluer particulièrement le travail accompli par notre rapporteur, François Pillet.
S’agissant de la caducité de l’offre de contrat en cas de décès de son destinataire, la position du Sénat a été suivie.
Le silence de la loi sur ce sujet constituait une source d’incertitude pour les héritiers qui, après le décès d’un proche et en cas de litige avec l’auteur du contrat, devaient s’en remettre aux tribunaux.
Les clarifications que nous avons apportées devraient donc garantir aux parties un régime stable et protecteur.
Aussi, à l’article 7, conformément au souhait du Sénat, le dispositif de lutte contre les clauses abusives dans les contrats d’adhésion a été limité aux seules clauses non négociables.
Les dispositions ayant trait à la révision judiciaire du contrat pour imprévision ont suscité plus de débats.
Il était question de savoir si le pouvoir de révision pouvait émaner d’une des deux parties uniquement, ce qui, pour le Sénat, constituait un gage d’insécurité juridique.
Toutefois, dans la mesure où cette hypothèse devrait heureusement rester théorique, sinon lettre morte, il a été décidé de se rallier à la position de l’Assemblée nationale, dans un esprit de compromis auquel nous nous sommes pleinement associés.
Mes chers collègues, aujourd’hui, je serai brève, soulignant que le projet de loi ratifiant cette ordonnance offre à nos partenaires économiques un cadre sécurisant et dote la France d’instruments juridiques modernes et lisibles.
Le groupe Union Centriste votera en faveur de ce projet de loi.