Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’ordonnance du 9 février 2017 concernant le droit de la concurrence en Polynésie française a été prise sur le fondement de l’article 74-1 de la Constitution. En conséquence, sous peine de caducité, elle doit être ratifiée dans les dix-huit mois suivant sa publication, c’est-à-dire d’ici le mois d’août.
Je veux d’abord rappeler le contexte de l’élaboration de cette ordonnance.
En 2014, la Polynésie française a voulu se doter d’un droit de la concurrence moderne et cohérent, dans le cadre d’une économie insulaire de petite taille, dépendant d’un nombre limité d’acteurs économiques.
Le marché polynésien ne représente en effet que 280 000 habitants, ce qui est propice aux monopoles ou, en tout cas, à une faible concurrence, au détriment des consommateurs.
À cette fin, les autorités polynésiennes ont élaboré un code de la concurrence, directement inspiré du livre IV du code de commerce national, prévoyant notamment la création d’une autorité polynésienne de la concurrence, sur le modèle de l’autorité de la concurrence métropolitaine. La Nouvelle-Calédonie avait déjà réalisé la même démarche peu de temps auparavant.
D’une part, une loi du pays relative à la concurrence, votée en juin 2014 et promulguée en février 2015, a édicté les dispositions relevant de la compétence de la Polynésie. Ce texte a été entièrement validé par le Conseil d’État, qui en avait été saisi par une organisation professionnelle locale.
D’autre part, une résolution de l’assemblée de la Polynésie française, adoptée en novembre 2014, a demandé à l’État de prendre les dispositions complémentaires relevant de sa compétence, en matière d’organisation judiciaire, de droit pénal, de procédure pénale et de procédure administrative contentieuse. L’ordonnance que je vous invite aujourd’hui à ratifier est le résultat de cette démarche.
Avant d’évoquer le contenu de l’ordonnance, je veux rapidement présenter l’autorité polynésienne de la concurrence, l’APC.
Les trois grandes missions de l’APC reprennent celles de l’autorité de la concurrence nationale : une fonction consultative, pour formuler des avis, soit d’initiative, soit à la demande des autorités locales ; une fonction de nature administrative d’autorisation des opérations de concentration économique, mais également – spécificité locale – des créations et extensions de surfaces commerciales ; une fonction de nature contentieuse de sanction des pratiques anticoncurrentielles, en particulier des cartels et ententes, mais également – autre spécificité locale – de certaines pratiques plus spécifiques à l’outre-mer, soit d’office sur proposition du rapporteur général de l’autorité, soit sur signalement d’une entreprise ou des autorités locales.
Le président de l’autorité a été nommé en juillet 2015, les quatre autres membres du collège en septembre et le rapporteur général en décembre. Le 1er février 2016, le code de la concurrence de Polynésie est officiellement entré en vigueur et l’APC a rendu sa première décision en juillet 2016, sur un dossier de concentration dans le secteur hôtelier.
L’autorité de la concurrence nationale a apporté un soutien particulier à la mise en place de l’autorité polynésienne.
Le projet d’ordonnance n’a été transmis à l’assemblée de la Polynésie française qu’à la fin de l’année 2016 : il a fallu deux ans pour répondre à la demande des autorités locales, pour rédiger une ordonnance de quatorze articles recopiant certains articles du code de commerce… Même s’il n’a pas été rendu en temps utile, l’avis de l’assemblée était en tout cas favorable au projet.
Publiée en février 2017, cette ordonnance appelait un décret d’application, qui devait être pris en principe avant le 30 juin 2017, madame la ministre, date butoir pour l’entrée en vigueur de l’ordonnance. À ce jour, plus d’un an après la publication de l’ordonnance, ce décret n’a toujours pas été publié…