Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la Haute Assemblée s’apprête à débattre du projet de loi relatif à l’élection des représentants au Parlement européen, que l’Assemblée nationale a adopté le 20 février dernier et qui vise à rétablir, pour les élections européennes, une circonscription électorale unique sur le territoire national.
Depuis la création des huit circonscriptions régionales en 2003, ce n’est pas la première fois que le rétablissement de la circonscription unique est débattu ici même. Vous le savez, une proposition de loi déposée par le groupe du RDSE a été adoptée le 23 juin 2010 par la Haute Assemblée pour rétablir cette circonscription unique.
J’ai l’espoir que le Sénat adoptera une nouvelle fois un texte permettant de rétablir cette circonscription unique. En effet, si les options quant au mode de scrutin sont multiples, celle-ci m’apparaît comme la plus claire, la plus intelligible et la plus respectueuse du pluralisme politique. Elle est donc, à mes yeux, la meilleure pour nos concitoyens.
Je sais, bien sûr, que tous ici n’approuvent pas cette vision. Mais, je le sais aussi, c’est dans un état d’esprit constructif que nous abordons tous ce débat.
Cet état d’esprit constructif est tout d’abord celui du Sénat, dont la marque de fabrique est de toujours chercher à enrichir les textes, à les améliorer. C’est également celui du Gouvernement : vous savez que, dès l’élaboration de ce texte, le Président de la République et le Premier ministre ont veillé à consulter l’ensemble des formations politiques dans le cadre d’une démarche de coconstruction législative.
Mesdames, messieurs les sénateurs, si le Gouvernement a retenu l’option de la circonscription unique, ce n’est donc pas du fait du hasard : c’est bien parce que la majorité des groupes politiques avaient, avec lui, un diagnostic commun.
Au-delà des différences de sensibilités et de positionnements que les formations politiques peuvent présenter au sujet de l’Union européenne, je crois que nous sommes tous d’accord pour affirmer que la situation actuelle n’est pas satisfaisante. Plus d’un Français sur deux ne se déplace pas aux urnes pour élire ses représentants au Parlement européen. Dans certains endroits, lors du dernier scrutin, l’abstention a même atteint 70 %.
Que l’on soit pour plus ou moins d’Europe, que l’on soit pour une Europe fédérale ou pour une Europe des nations, que l’on soit pour davantage d’intégration ou pour de nouveaux élargissements, l’on ne peut se satisfaire de si faibles taux de participation, qui minent la légitimité des députés européens et, finalement, affaiblissent la démocratie.
Il est évident que le mode de scrutin n’est pas l’unique cause de la hausse de l’abstention – il faut le reconnaître. Toutefois, son manque de clarté, que déplorent les électeurs, ne peut qu’être un facteur supplémentaire pour décourager les uns et les autres de se rendre aux urnes.
Il suffit – je sais que chacun d’entre vous, sur ces travées, le fait – de dialoguer avec nos concitoyens sur le terrain pour comprendre que le découpage en huit circonscriptions, sans cohérence historique, politique ou administrative, a contribué à brouiller le débat entre enjeux européens, enjeux nationaux et enjeux locaux.
Il fallait donc agir pour inverser cette tendance, et ce dans un délai court puisque, par tradition républicaine, le mode de scrutin n’est pas modifié dans les douze mois précédant une élection.
C’est ce que le Gouvernement entreprend avec ce projet de loi.
La première option était de créer treize circonscriptions correspondant aux nouvelles grandes régions. C’est d’ailleurs la solution que certains d’entre vous proposent.
Si le Gouvernement ne l’a pas retenue, ce n’est pas, comme on a pu l’entendre parfois, pour des raisons politiciennes, mais parce que le débat aurait certainement été perturbé par des enjeux étrangers à la nécessaire confrontation des idées et des projets relatifs à l’Europe.
De plus, ce découpage se traduirait par d’importants écarts entre les régions dans le nombre d’élus dont chacune disposerait : ce sont précisément ces écarts que le découpage en circonscriptions multirégionales tentait jusqu’à présent de combler.
Surtout, en atténuant les effets de la proportionnelle, un tel découpage aurait favorisé les grands partis et, ainsi, fragilisé le pluralisme politique auquel nous sommes, comme tous les Français, très attachés.
Une autre option, que préconisent également un certain nombre de sénateurs, aurait consisté à créer, d’une part, une circonscription « hexagonale » et, d’autre part, une circonscription ultramarine.
Je sais que ce sujet fait débat chez certains d’entre vous…