De ce fait, la circonscription unique sera donc utile pour Emmanuel Macron et les siens. On peut par conséquent légitimement se demander si la motivation électoraliste n’explique pas pour partie ce choix.
Il est également possible d’estimer que la pensée complexe d’un président conscient, comme il l’indiquait le 26 septembre dernier, de l’échec démocratique d’une avant-garde européenne imposant ses choix sans assise démocratique l’incite à utiliser le retour à la circonscription unique comme tremplin vers un dépassement fédéraliste des nations par le biais d’une généralisation des listes transnationales pour marcher vers une Europe politique.
Comme je l’ai indiqué précédemment, deux aspects du texte annulent, selon moi, l’avancée indéniable qu’aurait pu constituer le retour à la circonscription unique.
En premier lieu, le maintien du seuil de 5 % pour accéder à la répartition des sièges. Ce seuil instauré en 1977 n’a pas été revu depuis lors. Seuls neuf pays européens l’ont adopté. Tous les autres, dont l’Allemagne, ont des seuils plus bas – de 4 %, 3 %, voire 0 %.
Le chiffre de 5 % est d’autant plus surprenant que le seuil fixé pour accéder au remboursement des frais de campagne est de 3 %. Soyons cohérents : alignons ces deux chiffres pour favoriser le débat et la participation !
Le maintien du seuil de 5 % pour accéder à la répartition des sièges est un élément décisif dans notre choix de rejeter le présent projet de loi, mais il n’est pas le seul.
Ce texte substitue au temps d’égalité qui prévalait pour la campagne officielle des élections européennes le principe d’équité pour l’une des parts de la répartition, poursuivant en cela l’œuvre déjà entamée lors du quinquennat précédent.
Le dispositif proposé, complexe, favorise, d’une part, les partis dominants, et, d’autre part, l’influence des médias télévisés et instituts de sondage sur la vie politique. Le pluralisme et la démocratie sont gravement mis en cause par cette disposition, sentiment renforcé par l’ajout en cours de la discussion à l’Assemblée nationale d’un article – ou plutôt d’un cavalier législatif – instaurant le même dispositif pour les élections législatives. Pourquoi une telle précipitation ?
Emmanuel Macron applique encore une fois son fameux « en même temps ». L’habillage paraît relever du bon sens démocratique, mais lorsque vous examinez le contenu, c’est un verrouillage sophistiqué du système que vous découvrez.
Dans son discours à la Sorbonne, le chef de l’État a invité les citoyens à refonder le débat sur l’Europe et les élections européennes « par la base, par le bas, par le vrai ». Je suis d’accord ! Il n’y aura pas d’avenir en Europe sans écouter l’aspiration des peuples. Peut-être M. Macron devrait-il appliquer ces beaux préceptes dès aujourd’hui !
En tout état de cause, si nos amendements ne sont pas adoptés, nous voterons contre le présent projet de loi qui, en l’état, menace le pluralisme.