Intervention de Philippe Bonnecarrere

Réunion du 18 avril 2018 à 14h30
Protection des savoir-faire et des informations commerciales — Suite de la discussion en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Philippe BonnecarrerePhilippe Bonnecarrere :

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, la commission des affaires européennes a, à l’unanimité, émis un avis favorable sur le texte portant transposition de la directive « secret des affaires » – ou « secret d’affaires » – dans la version issue des travaux du Parlement européen et de l’Assemblée nationale, sans s’interdire ou sans vous interdire quelques améliorations de détail, pour deux raisons : le parcours complet et réfléchi du texte, qui a fait l’objet d’examens croisés, et le nécessaire équilibre entre la protection des affaires et, par là même, du secret des affaires et la liberté d’information, dans l’intérêt général.

Premièrement, je veux revenir sur le parcours du texte, complet et intéressant à mesurer, pour vous donner une vision complémentaire de celles qui vous ont été présentées par Mme la ministre et par notre collègue rapporteur.

En 2010 et 2011, la Commission européenne a mené des études et des consultations dans le cadre de la « Stratégie Europe 2020 », avec, comme enjeu, la protection des actifs immatériels des entreprises.

À partir de la fin de l’année 2011 et en 2012 a été conduite une consultation publique.

En 2013, la directive a été préparée et présentée par Michel Barnier, avec une réaction très positive des États.

L’année 2014 a vu l’examen de cette directive par le Parlement européen et le Sénat, avec une résolution que vous avez adoptée le 11 juillet 2014, approuvant les orientations retenues par la Commission.

En 2015, la commission des affaires européennes a suivi les négociations, dressant un nouveau point d’étape au mois de juillet.

En 2016, la directive a été adoptée par le Parlement européen, après l’examen de plus de 300 amendements.

Au premier trimestre de l’année 2018, elle a été examinée par l’Assemblée nationale.

Autrement dit, ce texte a une histoire. Il est le fruit d’une maturation qui garantit son équilibre. Il convient de le garder en mémoire, tout en constatant – ce n’est pas négligeable – la capacité de notre assemblée à travailler en amont des textes européens.

Deuxièmement, je veux évoquer le nécessaire équilibre entre secret des affaires et liberté d’information

Notre rapport a ciblé quelques dispositions à ajuster, mais, sur le fond, nous avons relevé une transposition de bonne facture, minimale et généralement rigoureuse, et la réaffirmation de la liberté d’information et d’expression. Je pense en particulier, sur ce point, à l’insertion d’un renvoi à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et, bien sûr, à la définition des éléments d’ordre public qui permettent à la liberté d’information et d’expression d’exercer son plein effet.

Je pense également à l’ajout, sur l’initiative de nos collègues de l’Assemblée nationale, d’une référence à la Charte de l’environnement, qui, vous le savez, fait partie de notre bloc de constitutionnalité depuis 2004.

Pour conclure, vous l’avez compris, mes chers collègues, tout est question, pour ce texte, de juste équilibre. Et ce n’est pas uniquement une vision centriste !

Si notre assemblée a une totale latitude législative dans la limite d’une transposition et n’est donc en rien tenue de s’aligner sur les positions du Parlement européen ou de l’Assemblée nationale, comme le souligne fréquemment le président de notre commission des lois, je me permets de vous inciter à une grande mesure, quelles que soient vos bonnes volontés ou vos bonnes intentions. En effet, il ne faudrait pas donner l’impression d’étendre excessivement le secret des affaires pour certains. De même, une trop grande créativité législative en matière d’exceptions entraînerait une complexité rédactionnelle qui finirait par nuire aux objectifs mêmes de la loi.

Cela dit, mes chers collègues, il ne me semble pas interdit de préparer en amont, dans le respect des compétences de chacun, les conditions d’un accord entre les deux assemblées sur ce texte, qui ne mérite ni l’infamie d’un renvoi en commission ni celle d’une question préalable, mais qui doit garder jusqu’au bout le cap du juste équilibre.

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