Intervention de Nicole Belloubet

Réunion du 18 avril 2018 à 14h30
Protection des savoir-faire et des informations commerciales — Article 1er, amendement 48

Nicole Belloubet :

Pour ce qui concerne l’amendement n° 48 rectifié, relatif à l’exclusion des mécanismes de nature fiscale élaborés par une entreprise, nous avons déjà vu qu’une information sera qualifiée de secret des affaires si elle réunit les trois critères qui sont précisés par la directive et que nous avons déjà évoqués.

Cette directive ne prévoit pas la possibilité d’exclure par principe certains types d’informations de nature fiscale par exemple, ainsi que vous le proposez. En revanche, comme l’a relevé M. le rapporteur, un lanceur d’alerte qui signale un mécanisme d’optimisation fiscale pourra se prévaloir de la dérogation qui est prévue dans la proposition de loi et que la directive institue à son profit, si le montage financier révélé peut être qualifié de comportement répréhensible. Ce sera le cas s’il porte atteinte à l’intérêt général. Nous aurons l’occasion de revenir sur ce point. Je suis donc défavorable à cet amendement.

L’avis est également défavorable sur l’amendement n° 7. Les auteurs de cet amendement expriment la crainte que, compte tenu de la protection accordée au secret des affaires, l’accès à certaines informations d’intérêt général ne soit plus possible, notamment dans le domaine de l’environnement, de la fiscalité, du droit du travail, de la lutte contre les fraudes, de la corruption.

Je voudrais ici rassurer : il ne sera évidemment pas possible pour une entreprise de s’opposer aux enquêtes administratives ou judiciaires dont elle pourrait faire l’objet. Il ne saurait, là non plus, être question d’empêcher de révéler des fraudes fiscales, des manquements au droit du travail ou des actes de corruption sous quelque forme que ce soit. Cela est énoncé tout à fait clairement à l’article L. 151-6 du code de commerce.

De plus, pourront être révélées les informations qui sont couvertes par le secret des affaires, lorsque cette révélation est faite dans le cadre de l’exercice légitime du droit à la liberté d’expression et de communication ou encore dans le cadre d’un droit d’alerte.

Je voudrais d’ailleurs répondre en ce sens à Mme la sénatrice Lienemann, qui observait, au tout début de l’examen de l’article 1er, qu’au fond cette proposition de loi faisait de la liberté d’expression une exception et du secret des affaires le principe. Je rappelle que ce texte s’inscrit dans le cadre général de notre Constitution, laquelle porte à son plus haut point juridique la liberté d’expression, qui est donc la liberté première. Bien sûr, nous traitons ici d’un point singulier, mais tout cela s’inscrit dans un cadre constitutionnel.

Je terminerai en disant que, telle que vous la proposez, la modification de l’article L. 151-1 sur la définition du secret des affaires ne me semble ni conforme à la directive ni nécessaire pour répondre aux préoccupations des auteurs de cet amendement.

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