Intervention de Bernard Delcros

Réunion du 18 avril 2018 à 21h30
Projet de programme de stabilité pour les années 2018 à 2022 — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Photo de Bernard DelcrosBernard Delcros :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, messieurs les rapporteurs généraux, chers collègues, le débat sur le projet de programme de stabilité pour les années 2018 à 2022 se déroule dans un environnement macroéconomique plutôt favorable. Après la Banque de France et l’OCDE, vous confirmez, monsieur le ministre, l’amélioration des prévisions budgétaires par rapport à la loi de finances de 2018. Le taux de croissance est revu à la hausse. Il s’établira à 2 % du PIB en 2018 et à 1, 9 % en 2019, contre une prévision initiale de 1, 7 % pour chacune de ces deux années.

Ces chiffres encourageants traduisent la reprise au sein de la zone euro, l’accélération de la demande mondiale, mais aussi le dynamisme des investissements de nos entreprises.

Elle devrait aussi, à juste titre, rassurer une partie de nos concitoyens qui, au-delà des chiffres, attendent des retombées concrètes et des améliorations tangibles de leur quotidien.

C’est bien tout l’enjeu de cette reprise : poursuivre nos efforts pour consolider cette amélioration et accélérer le redressement de nos finances publiques – nous avons indiqué à plusieurs reprises que c’était une priorité -, mais aussi veiller à ce que ce regain de croissance contribue à réduire les inégalités, qu’elles soient sociales ou territoriales, ainsi qu’à maintenir et à améliorer la qualité des services apportés à nos concitoyens sur l’ensemble du territoire national. C’est le juste équilibre que nous devons trouver.

En conséquence le redressement de nos finances publiques, la diminution de la dette et la réduction du déficit public sont au rendez-vous. La dette s’établirait à 96, 4 % du PIB en 2018 et pourrait atteindre 89, 2 % en 2022. Cette nette amélioration par rapport aux prévisions précédentes est plutôt rassurante, notamment dans une perspective de hausse des taux d’intérêt.

Le déficit serait, quant à lui, de 2, 3 % du PIB en 2018 et de 2, 4 % en 2019, au lieu des 2, 8 % et 2, 9 % jusque-là anticipés. Un léger excédent budgétaire pourrait même être obtenu à l’horizon de 2022, ce qui serait une première depuis 1974 et, à coup sûr, un résultat susceptible de donner confiance en l’avenir. Ces résultats devraient permettre à la France de sortir de la procédure pour déficit excessif avant l’été prochain.

Toutefois, deux interrogations demeurent, comme l’ont souligné le président et le rapporteur général de la commission des finances.

La première porte sur la suppression de la taxe d’habitation, qui représente un montant variant de 10 milliards d’euros à 14 milliards d’euros, en fonction de l’inclusion ou non des résidences secondaires et de la date retenue. Cette perspective ne semble pas intégrée dans le programme de stabilité. Comment envisagez-vous le financement de cette mesure ? Quel serait son impact sur la trajectoire de nos finances publiques ?

La seconde interrogation concerne la reprise, même partielle, de la dette de la SNCF annoncée par le Président de la République à l’horizon de 2020, qui pourrait modifier substantiellement cette trajectoire. Comment envisagez-vous de répondre à cette nouvelle donne ?

S’agissant du taux des prélèvements obligatoires, l’objectif affiché par le Gouvernement dans la loi de programmation des finances publiques était d’aboutir à une diminution d’un point de PIB d’ici à 2022, pour atteindre 43, 7 %. Cet objectif est revu à la baisse par le présent programme de stabilité, puisque la pression fiscale devrait désormais s’établir à 44, 3 % du PIB à la fin du quinquennat, soit 0, 6 point de plus que prévu.

Toutefois, nous le savons tous, la reprise économique suscite, et c’est tant mieux, une hausse mécanique des recettes de TVA, de l’impôt sur les sociétés et de l’impôt sur le revenu, liée à l’élargissement de l’assiette.

L’autre raison qui explique ce résultat, monsieur le ministre, c’est l’adoption par le Parlement, dans la première loi de finances rectificative pour 2017, de la contribution exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés des très grandes entreprises, pour faire face à l’obligation de remboursement de la taxe sur les dividendes.

Néanmoins, les réformes de l’impôt sur les sociétés et de l’impôt sur le revenu, de la fiscalité sur le capital que vous avez engagées, comme la suppression progressive de la taxe d’habitation devraient favoriser une baisse progressive des prélèvements obligatoires.

Enfin, le niveau des dépenses publiques devrait atteindre près d’un demi-point de plus que ce qui était initialement prévu, pour s’établir à 54, 4 % du PIB.

J’entends bien tous ceux, nombreux, qui réclament une réduction plus drastique de la dépense publique. Mais on ne peut pas, dans le même temps, demander le maintien de tous les services, voire des mesures nouvelles, qui entraînent des dépenses supplémentaires ! Ainsi, l’objectif de baisse de la dépense publique, qui doit bien évidemment être visé, ne doit pas l’être aveuglément.

Pour conclure sur la question du redressement des finances publiques, sachez, monsieur le ministre, que nous approuvons votre décision de faire figurer cette priorité parmi les quatre axes de votre programme national de réforme. Comme M. le ministre l’a rappelé, nous portons la responsabilité, à l’égard des générations qui viennent, d’assainir nos finances publiques et de réduire notre endettement.

Les fruits de la croissance retrouvée doivent aussi servir à l’amélioration de la situation des plus fragiles, celle des Français comme celle des territoires. Et je veux rappeler que, dans certains domaines prioritaires, le maintien de la qualité du service public nécessite, et nécessitera demain encore davantage, un engagement soutenu de l’État. Par exemple, dans les domaines de la santé, dans nos hôpitaux, dans nos EPHAD, qui doivent faire face au vieillissement de la population et à la dépendance qui l’accompagne, dans l’éducation, le transport, la sécurité, l’approche comptable ne peut pas être la seule réponse.

Par ailleurs, l’aménagement du territoire, qui doit prioritairement viser l’équité dans l’accès aux services pour tous nos concitoyens et dans tous les territoires, nécessite que l’État joue pleinement son rôle de régulateur.

Vous avez annoncé, monsieur le ministre, vouloir engager des réformes structurelles une fois rendu le rapport du Comité action publique 2022. Nous comptons sur vous pour que ces réformes soient équilibrées et que le nécessaire mouvement de réduction de la dépense publique, que nous soutenons, soit raisonné, dans le respect des territoires et des citoyens les plus fragiles.

Mes chers collègues, la feuille de route budgétaire qui nous est aujourd’hui proposée nous paraît réaliste et opportune.

Toutefois, à l’occasion de ce débat, nous avons souhaité alerter sur les écueils que ces réformes devront éviter, afin que le redressement de nos finances publiques, qui doit impérativement accompagner l’embellie budgétaire et pour lequel nous serons au rendez-vous, ne laisse personne au bord de la route, et afin qu’aucun territoire ne soit abandonné.

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