On a entendu bien des choses sur les propriétaires du Signal, qui seraient des nantis, des privilégiés, et qui devraient assumer sans se plaindre les conséquences de leur désir de vivre au bord de l’eau. Je souhaite couper court à ces représentations, car la majorité d’entre eux sont en réalité des personnes séduites par le projet initial, mais de condition modeste, et aujourd’hui très éprouvées moralement et physiquement par la longueur des procédures et un manque d’informations sur la réalité des initiatives conduites pour leur apporter une solution.
Certains ont investi toutes leurs économies et doivent en plus, cela a été rappelé, continuer à rembourser leur dette jusqu’en 2020, 2025, voire 2030 ; d’autres ont dû se reloger et acquittent un loyer ; tous continuent d’assumer les frais de syndic de copropriété, les assurances et le coût d’une procédure longue et coûteuse pour se défendre. Les frais d’avocats s’élèvent à 100 000 euros depuis 2012, d’après leurs représentants.
Par ailleurs, depuis quatre ans, date de l’évacuation, onze propriétaires sont décédés. La question des successions est alors apparue comme un nouveau problème pour leurs descendants, qui sont en contact avec l’administration fiscale pour estimer la valeur de la transmission, ajoutant du découragement à la détresse.
Quant à l’immeuble, il a été vandalisé et occupé de façon irrégulière en dépit de nombreuses plaintes des propriétaires. Il est en très piteux état, et sa protection par la commune n’est pas suffisamment assurée à ce jour, alors même que cette dernière pourrait voir sa responsabilité engagée en cas d’accident.
Permettez-moi enfin de vous faire part d’une conviction : le cas du Signal est tout à fait exceptionnel, et appelle de ce fait un traitement lui-même exceptionnel. Si le recul du trait de côte s’impose comme un phénomène commun à de nombreux territoires et s’il nécessite une approche intégrée et globale, sans doute davantage dans une logique d’acquisition que d’indemnisation, le cas du Signal est inédit et la situation des copropriétaires est injuste. Cette situation a trop duré, je le dis fermement.
Selon l’Observatoire de la côte Aquitaine, le trait de côte recule de 2, 5 mètres en Gironde chaque année et de 1, 7 mètre dans les Landes. Dans le cas du Signal, le recul du trait de côte est de 5 à 7 mètres par an en moyenne, recul accentué notamment par la présence d’une digue à proximité, qui protège le quartier de l’Amélie à Soulac-sur-Mer et qui a tendance, de plus, à accélérer les courants et à empêcher le sable de se stabiliser.
Si nous sommes d’accord sur la nécessité de régler le problème de l’indemnisation et de la propriété de l’immeuble, le Gouvernement doit maintenant prendre ses responsabilités.
Le dispositif prévu par l’article unique de la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui vise à rendre éligibles les propriétaires de l’immeuble du Signal à une indemnisation rétroactive par le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit « fonds Barnier », créé en 1995.
Nous devons également éviter qu’une telle situation ne se reproduise. C’est pourquoi il est fondamental d’inscrire rapidement dans les textes une obligation d’information préalable à l’acquisition d’un bien proche du rivage, pour que les futurs propriétaires de ce type de biens aient pleinement conscience du risque de recul du trait de côte.
Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, j’attire votre attention sur le fait qu’un amendement du Gouvernement serait nécessaire pour établir clairement un transfert de propriété. En l’état, le dispositif permettra uniquement d’indemniser les propriétaires.