Intervention de Michel Vaspart

Réunion du 16 mai 2018 à 14h30
Indemnisation des interdictions d'habitation résultant d'un risque de recul du trait de côte — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Michel VaspartMichel Vaspart :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la rapporteur, mes chers collègues, le sujet qui nous réunit cet après-midi appelle – enfin ! – une réponse du Gouvernement, alors qu’il est sollicité pour la troisième fois sur l’éligibilité de l’indemnisation du recul du trait de côte au titre du fonds Barnier.

Mes collègues Françoise Cartron, auteur de la présente proposition de loi, et Nelly Tocqueville, rapporteur, ont parfaitement restitué le contexte avant moi : il s’agit de traiter le cas particulier des propriétaires de l’immeuble Le Signal construit à Soulac-sur-Mer, en Gironde, dans les années soixante-dix, impactés par une interdiction définitive d’habiter ou d’occuper les lieux prise en raison de l’érosion du trait de côte, tant et si bien que l’immeuble est devenu inhabitable depuis de nombreuses années déjà, sans qu’ils aient été expropriés ni indemnisés, comme cela a été répété.

Je ne voudrais pas redire ce que mes collègues ont déjà exprimé aujourd’hui, et ce qui avait été déjà dit lors de l’examen de deux précédentes propositions de loi : la proposition de loi sur le recul du trait de côte présentée par Pascale Got et la proposition de loi relative au développement durable des territoires littoraux, que j’ai déposée avec mes collègues Retailleau et Bas et qui fut largement adoptée par le Sénat en séance publique en janvier dernier.

Merci, madame la secrétaire d’État, d’avoir enfin reconnu qu’il s’agit d’un sujet stratégique : cela fait déjà plusieurs années que nous le disons au Sénat !

La proposition de loi de Françoise Cartron reprend à l’identique l’article consacré au Signal.

Les mois passent, et les propriétaires, pour la plupart de modestes retraités, attendent désormais seulement, si j’ose dire, une indemnisation.

Face à cette situation, vous nous avez opposé un refus en janvier, en nous disant que l’érosion dunaire n’entrait pas dans le champ d’application de l’article L. 561–1 du code de l’environnement.

Il est par ailleurs pris acte du sort de la question prioritaire de constitutionnalité déposée par le Conseil d’État, et rejetée par le Conseil constitutionnel le 6 avril dernier. Comme cela vient d’être rappelé, le Conseil d’État doit se prononcer sur le fond en juin.

Le Gouvernement dira qu’il faut attendre juin, voire la fin d’année, comme vous l’avez dit, madame la secrétaire d’État, ou bien encore d’attendre le lancement des travaux d’un groupe de travail sur l’érosion du trait de côte, que vous avez vous-même annoncé en janvier dernier, groupe de travail au sujet duquel on attend encore d’être sollicité…

Certes, la création de ce groupe de travail sera peut-être un progrès puisque le recul du trait de côte est général : il appelle une réflexion globale et des solutions de principe et pérennes de façon à anticiper ces difficultés pour les propriétaires, les élus et les professionnels de la mer.

Mais s’agissant du cas particulier de l’immeuble Le Signal, vous comprendrez, madame la secrétaire d’État, qu’il ne soit pas possible d’attendre. C’est d’ailleurs à l’unanimité que la commission a adopté ce texte le 18 avril dernier, afin de prévoir ce cas éligible au fonds Barnier.

J’y suis personnellement plus que favorable et je soutiens fortement cette proposition de loi discutée dans la niche réservée au groupe socialiste et républicain.

Il est des sujets, madame la secrétaire d’État, qui transcendent et qui devraient transcender les clivages politiques, et c’en est un. Plus généralement, la plupart des sujets qui touchent au littoral échappent aux clivages politiques, alors que certains veulent souvent, de mauvaise foi, opposer les protecteurs du littoral et les autres, ce qui finit par être insupportable.

Cependant, le Gouvernement le sait bien, ainsi que les sénateurs, qui représentent les élus locaux, ces élus locaux placés dans des situations inextricables du fait de l’interprétation jurisprudentielle fluctuante de la loi Littoral de 1986 appartiennent à tous les bords politiques. C’est un message que je m’efforce de faire passer depuis mon élection au Sénat en 2014.

Les élus locaux du littoral comme les associations de propriétaires dans ce domaine ne font pas de politique, ils sont pragmatiques : il n’est pas question de porter atteinte à l’environnement, il est seulement question, si j’ose dire, de trouver des solutions pragmatiques utiles à nos concitoyens et aux élus qui les représentent, sans dogmatisme. Et j’aimerais bien que le ministre, les secrétaires d’État et les hauts fonctionnaires du ministère soient dans le même état d’esprit.

Vendredi dernier encore, je me suis rendu à Plestin-les-Grèves, dans mon département des Côtes-d’Armor, sollicité par une famille sommée de détruire sa maison, alors qu’elle détient pourtant un permis de construire en bonne et due forme, une maison écologique à énergie positive construite dans une dent creuse. J’ajoute que la mairie s’est vu refuser l’extension de sa zone d’activité, alors qu’elle est en continuité de celle qui existe déjà. Nous allons là au-delà de la loi de 1986.

Excès de zèle ou parapluie inutile ? Madame la secrétaire d’État, cela n’est plus supportable et les élus locaux ne le supportent plus. Aujourd’hui, si le Gouvernement continue de faire la sourde oreille, ce sera non pas une erreur, mais une faute impardonnable.

Sur tous ces points, la position du Gouvernement doit être clarifiée, pour que chacun soit au clair et prenne ses responsabilités. Comment comprendre la remise à plus tard et la création de groupes de travail, alors que le travail a été fait par les représentants du peuple, notamment par le Sénat ?

Pour en revenir au Signal, je voterai cette proposition de loi sans aucune réserve, et c’est aussi la position de mes collègues du groupe Les Républicains.

Les propriétaires du Signal ne peuvent plus attendre. J’aimerais vous convaincre aussi de l’urgence à ouvrir clairement le sujet de la clarification de la jurisprudence sur la loi Littoral, en lien avec notre droit de l’urbanisme. La discussion à venir du projet de loi ÉLAN, le projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, peut être l’occasion de clarifications. Je le propose, je le souhaite, je l’espère et je vous en conjure.

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