Intervention de Laurence Harribey

Réunion du 16 mai 2018 à 14h30
Indemnisation des interdictions d'habitation résultant d'un risque de recul du trait de côte — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Laurence HarribeyLaurence Harribey :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la rapporteur, mes chers collègues, mon intervention vient clore un concert unanime ou presque appelant à résoudre une énigme, celle de ce qu’on pourrait appeler le mauvais génie français : pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?

Comme l’a souligné Mme la rapporteur, forte de l’unanimité de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, la situation est ubuesque, kafkaïenne.

Ce serait risible, si soixante-quinze familles n’étaient pas en cause : non pas des investisseurs à haut niveau de revenus, ni des marchands de nuitées touristiques, mais, tout simplement, des familles, pour l’essentiel modestes, qui se sont endettées sur vingt-cinq, voire trente ans, comme l’a expliqué Françoise Cartron, en faisant confiance à un plan d’aménagement du littoral aquitain supervisé par l’État dans les années 1960.

Les planificateurs ne sont pas allés au bout de l’aménagement, car, comme par hasard, ils n’avaient pas prévu le recul du trait de côte. Le droit est rarement en amont des faits.

Depuis quatre ans, les propriétaires se voient interdire l’accès à leur bien, sans pour autant avoir été expropriés en droit, au motif que l’article L. 561–1 du code de l’environnement n’établit pas de lien formel entre l’érosion côtière et la menace grave pour la vie humaine. Par voie de conséquence, impossible pour eux d’être indemnisés par le fonds Barnier.

Cette absence de droit pose problème au regard de la responsabilité de l’État, comme l’a signalé notre rapporteur, puisque c’est lui qui a délivré le permis de construire, et de celle des collectivités territoriales – l’arrêté de péril sans expropriation, quelle hypocrisie ! –, mais aussi de l’égalité entre citoyens : quelques kilomètres plus loin, comme l’a rappelé Mme Cartron, d’autres zones ont bénéficié d’un enrochement. Au regard, aussi, des enjeux environnementaux, puisque si l’érosion rocheuse peut être prise en compte, tel n’est pas le cas de l’érosion sableuse.

Nous sommes bien en présence d’un vide juridique. Or un vide juridique est fait pour être comblé.

Tel est l’objectif de cette proposition de loi, d’une clarté à toute épreuve et d’une grande simplicité. Préciser l’article L. 561–3 du code de l’environnement, d’une manière limitée dans le temps, pour éviter toute dérive, on ne saurait faire ni plus simple ni plus efficace.

Avec ce texte, le cas qui nous préoccupe n’est pas noyé – sans jeu de mots – dans un dispositif global. Vous avez dit, madame la secrétaire d’État, qu’il faut du courage pour prendre de la hauteur : pour moi, le courage consiste parfois à admettre qu’on ne détient pas la vérité. Une certaine humilité, c’est aussi une forme de courage !

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