Intervention de Jérôme Bascher

Réunion du 16 mai 2018 à 14h30
Infractions financières et suppression du « verrou de bercy » — Article additionnel après l'article 1er

Photo de Jérôme BascherJérôme Bascher :

Cet amendement reprend un dispositif proposé en juillet 2013 par la commission des lois et adopté effectivement par cette commission, mais pas par le Sénat, ma chère collègue. Je tiens à repréciser les choses sur ce sujet important.

Le mécanisme prévu par l’amendement soulève plusieurs difficultés de fond. En effet, quel sera l’impact sur les services de justice et sur l’administration ? Par exemple, l’interdiction de lancer des transactions sans passer par le parquet suscite des interrogations sur la réactivité du dialogue entre l’administration et le contribuable, comme sur la préservation du secret fiscal.

S’agissant de l’égalité entre les citoyens, au nom de quoi introduirait-on une procédure spéciale pour certains cas de fraude fiscale ? Toutes les affaires graves doivent aller devant le juge pénal, qu’elles relèvent ou non des conditions fixées par cet amendement. C’est justement l’avantage de la procédure actuelle, qui permet l’application de critères homogènes grâce au contrôle de la CIF.

Il convient également de réfléchir au périmètre du mécanisme prévu par l’amendement. Les cas de fraude fiscale aggravée sont ceux qui justifient le plus le renvoi devant l’autorité judiciaire, mais ce sont aussi ceux pour lesquels la compétence technique de l’administration est essentielle. Cela ne s’oppose en rien au dépôt de plainte. Certes, il manque à l’administration des moyens spéciaux pour mener l’enquête, nous en avons parlé, mais elle peut d’ores et déjà les obtenir par la procédure d’enquête judiciaire fiscale instaurée en 2009, sous le double contrôle de la commission des infractions fiscales et du parquet.

Avec l’adoption de cet amendement, il faudrait craindre une désorganisation du fonctionnement actuel, ce qui aurait finalement une incidence catastrophique sur la qualité du recouvrement des impôts et des pénalités.

S’agissant de la première partie de l’amendement, c’est précisément lors des débats portant sur ce point que l’Assemblée nationale a décidé de constituer une mission d’information. À un moment donné, il serait souhaitable d’avoir un minimum de cohérence !

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission vous demande, madame Goulet, de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, elle se verra contrainte d’émettre un avis défavorable.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion