Madame la ministre, nous avons du respect autant pour votre personne que pour votre fonction. Contrairement aux apparences, nous ne sommes pas là pour vous mettre en difficulté. Nous sommes peut-être même là pour vous aider à marquer votre passage politiquement, au sens noble du terme, et je mesure mes paroles.
Depuis le début de la semaine, j’ai assisté à plusieurs débats. Nous nous apercevons, au fil des années, que la haute administration prend de plus en plus le pas sur le politique dans notre pays. Tout ce que vous nous avez lu, nous le connaissons : nous l’avons déjà entendu dans la bouche d’autres ministres, car c’est écrit par votre administration.
Ce qui est demandé aujourd’hui n’est pas faramineux, mais relève au contraire d’une justice extrême. On pourrait avancer de nombreux arguments – ils ont d’ailleurs été développés par mes collègues – et j’en ajouterai un. Il serait possible de faire une simulation de calcul des cotisations sur les services rendus par ces agricultrices et agriculteurs qui n’ont jamais été rémunérés.
Je ne remonterai pas jusqu’aux pertes des dernières guerres, mais nous pouvons trouver toutes sortes d’exemples de cette rémunération qui n’a jamais été donnée à ces agricultrices et agriculteurs.
Les temps changent. Au moment où l’on s’apprête à débattre d’une loi portant sur l’équilibre entre les relations commerciales, l’alimentation et le revenu des agriculteurs, il ne faut pas oublier ceux qui se sont sacrifiés pour que les agriculteurs actuels, leurs successeurs, puissent exploiter la terre le plus décemment possible. Pourquoi insister sur ce point ? Parce que ceux qui parviennent à peu près à s’en sortir aujourd’hui sont ceux qui ont eu la chance de trouver un agriculteur qui leur a cédé l’exploitation à un prix modique, en dessous de sa valeur réelle.
Les agriculteurs ont également entretenu le paysage, ils ont réussi, depuis l’après-guerre, à nourrir la population pour un coût relativement faible. Vous savez que la part de l’alimentation dans le budget des ménages est très faible, en particulier aujourd’hui. Quand on parle du partage de la valeur, cela ne veut rien dire : il n’y a plus de valeur dans le produit ! Ceux qui sont en retraite aujourd’hui ont connu cela.
Si l’on faisait une simulation de calcul de ce qu’on leur doit réellement par rapport au revenu sur lequel ils auraient pu cotiser, on parviendrait à une somme bien plus importante que celle qui vous est demandée aujourd’hui. Madame la ministre, soyez une vraie politique ! Nous vous soutenons et vous soutiendrons face à votre administration et à votre Premier ministre, et nous vous en remercions d’avance.